Nombreux sont les photographes de talent qu’on peut rencontrer au Salon de la Photo, que ce soit grâce aux “Zooms” exposés chaque année, ou encore aux photographes mis en avant sur d’autres stands. Et notamment sur celui du magazine Compétence Photo, qui cette année mettait en avant 2 photographes en raison de la sortie de leur livre photo, et notamment Julie de Waroquier. Vous la connaissez peut-être déjà pour son univers onirique qui transparaît dans ses images avec une vraie identité aux tons pastel.

Si ce n’est pas le cas, ce n’est pas grave puisque j’ai eu le plaisir de l’interviewer au salon, histoire de revenir sur ses images, son univers, et aussi sa pratique photo. Bref, vous allez voir que vous allez non seulement mieux comprendre ses images mais aussi apprendre quelques petites choses qui pourront vous servir à vous aussi !

On a fait ça dans les (bruyantes) allées du Salon, et je n’avais qu’un micro-cravate pour deux, donc le son est parfois un peu mauvais, mais normalement tout ce que dit la sympathique Julie est parfaitement audible ! 🙂 J’ai quand même fait faire une transcription texte au cas où, ou pour ceux qui préfèreraient lire qu’écouter la vidéo.

Vous pouvez retrouver les images de Julie sur son site web, et acheter son livre sur le site de Compétence Photo ou sur Amazon.

Voici donc l’interview de Julie de Waroquier :

YouTube video

 

Laurent : Bonjour à tous et bienvenue sur Apprendre la photo.
Je me trouve aujourd’hui avec Julie de Waroquier avec laquelle j’organise une interview presque improvisée à l’occasion du salon de la Photo et de la sortie de son livre « Rêvalités » que je tiens ici . Mais on y revient.
Bonjour Julie.

Julie : Bonjour !

L : Est-ce que tu peux commencer par te présenter en quelques mots aux lecteurs qui ne te connaissent pas ?

J : Oui, certainement. Je m’appelle Julie de Waroquier. J’ai 23 ans ; je fais de la photo depuis 5 ans et depuis 3 ans en tant que pro en parallèle avec mes études de philo.

L : D’accord. Tu as exposé un peu ? Tu as le bouquin ? Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus là-dessus ?

J : Ce livre est un projet assez récent : le livre sort dans 2 jours. Il est en avant-première là, au salon. C’est un peu l’aboutissement de 4 ans d’aventures, des expositions un peu partout, des projets, des collaborations. C’est trépidant !

Julie de Waroquier photo rêve lit nounours coussinL : On va parler de tes images d’abord, évidemment, c’est quand même le sujet le plus important aujourd’hui.
Tes images donnent véritablement envie de prendre un chocolat chaud, un cookie et de se blottir sous un plaid en les regardant.
On a vraiment envie d’en profiter confortablement quoi !
Au-delà de ce sentiment très instinctif de “on se sent bien”, surtout quand on parcourt le livre et qu’on lit les textes qui vont avec, on ressent qu’il y a quand même quelque chose de plus profond derrière, voire de douloureux.
Ton expression “les morsures du réel” m’a beaucoup marqué.
Cet attrait pour le rêve, c’est une façon de s’échapper de la réalité ?

J : Pas vraiment en fait. Ce n’est pas le rêve pour s’échapper de la réalité ; c’est plus comme la réalité qui est subjective en fait. Tout ce qui est pensée, sentiment, inconscient, c’est aussi réel que le monde objectif sauf que ça se passe dans notre tête. Et c’est tout ce qui m’intéresse en fait. Montrer que ça a du sens, que c’est à partir de là qu’on se construit, qu’on grandit : et c’est cela que j’explore. Et donc ça inclut effectivement des angoisses, des doutes. Et effectivement comment on confronte cette réalité intérieure et la réalité extérieure : c’est ça qui m’intéresse beaucoup.

L : En fait c’est le rêve en temps qu’autre réalité, d’où le titre « Rêvalités ».

J : D’où le titre « Rêvalités », oui

Julie de Waroquier photo liberté oiseaux rideaux blancs femmeL : J’ai noté des choses qui reviennent souvent dans tes images, et notamment les avions et les oiseaux – surtout des mouettes-, et dans une moindre mesure des horloges aussi. J’ai envie de te demander pourquoi ! Symbole du principe de liberté ? Du temps qui passe ?

J : Oui, chacun des éléments dans mes photos est symbolique d’autre chose, donc c’est soit la liberté soit autre chose. Mais oui, j’essaye de prendre des symboles qui soient assez parlants ; parce qu’un symbole qui ne parle pas immédiatement n’est pas efficace donc j’essaye de prendre des objets assez simples, de les inclure dans des compositions plus ou moins complexes, jusqu’à ce que ça fasse une image qui ait un sens. Oui parfois c’est du symbolisme assez simple, pour que ce soit efficace, en fait.

L : Tu es étudiante en philo aussi c’est ça ?

J : Oui

L : Est-ce que tes études en philo apportent quelque chose à tes images ? (ou inversement d’ailleurs)

J : Ça me permet de leur donner sens, en fait. Au début c’était plutôt distinct, parce que la philosophie c’était la rigueur, la démonstration, et c’est de la logique, alors que la photographie pour moi c’était l’évasion, l’imagination, donc des catégories opposées. Mais maintenant en fait ça m’aide à comprendre ce que je fais, à donner du sens et à comprendre où je vais et où je peux aller. Ça me permet en fait de me situer et de mieux en parler en fait ; de mieux comprendre ce que je fais, en fait.

L : D’accord. Alors, tu te mets souvent en scène toi-même dans tes images, c’est parce que ce que tu racontes l’image, c’est un peu Toi, tes rêves, ou alors c’est parce que tu maîtrises peut-être plus la situation qu’avec un modèle, … ?

J : Oui en fait, j’aime bien …. En fait c’est moi mais ça pourrait ne pas être moi. Ce ne sont pas des autoportraits au sens où il faut absolument que ce soit moi sur la photo : ça pourrait être quelqu’un d’autre. Maintenant j’aime bien tout maitriser dans la photo. Quand je suis à la fois photographe et modèle, je maitrise tout et puis c’est vraiment ma photo à 100%, et c’est vrai que laisser un modèle apparaitre dans sa photo, enfin, il y a un petit bout d’âme qui n’est pas à nous. C’est vraiment quelque chose qu’il faut admettre, qu’il faut laisser être. C’est une autre manière de photographier, quoi ! Je fais les deux mais j’apprécie beaucoup l’autoportrait pour ça.

photo femme rue cartes qui tombes pluie de cartes Julie de WaroquierL : Donc au fur et à mesure qu’on avance dans le livre, on retrouve quand même de plus en plus de modèles. Enfin moi j’ai senti beaucoup plus dans tes images au début qu’à la fin du bouquin : j’imagine que c’est un peu volontaire quand même.

J : Oui, oui

L : J’ai vraiment le sentiment qu’il y a une progression dans l’histoire que tu nous racontes, que tu nous chuchotes presque hein, tu évoques des choses : c’est finalement très peu de texte, ça laisse la place aux images –ce que j’aime beaucoup, d’ailleurs ! 4 :12 Est ce que cette apparition des modèles en relation avec l’histoire, c’est parce que la photo est moins liée à ta personne …

J : C’est ça en fait : dans le livre, ce que je voulais, c’était partir de l’intériorité d’abord, d’un personnage et puis, …. Enfin il y a trois temps, comme trois chapitres : le premier c’est la tension entre rêve et réalité, le personnage qui voudrait arriver mais ça ne marche pas forcément ; le deuxième temps c’est l’introspection qui est très douloureuse ; et le troisième temps c’est la sortie. Donc c’est pour ça qu’il fallait, dans cette ouverture au monde, il fallait qu’il y ait d’autres personnages qui apparaissent et que ce ne soit plus centré sur soi. Il fallait vraiment …. Il n’y a plus de Je en fait, donc il y a moins de Je dans cette troisième partie alors qu’il n’y a que ça dans la deuxième, enfin il n’y a que des Tu des Je et je voulais sortir, enfin je voulais vraiment que ça se termine par une ouverture à l’autre et au monde.

L : C’est vraiment intéressant ce que tu dis parce que j’avais ressenti ça mais pas de façon aussi précise, et le fait de t’entendre le dire, je vais re-regarder le bouquin avec un œil un peu différent . C’est intéressant parce que si vous achetez le bouquin, repassez-vous ce passage de l’interview !
Ce n’est pas forcément ce qui m’intéresse le plus moi, mais mes lecteurs vont me jeter des cailloux si je ne te pose pas quelques questions là-dessus.

J : D’accord ! C’est le matériel ?

L : Comment tu fais ? Je veux dire, il y a manifestement un bon travail au traitement et à la retouche derrière, à moins que tu aies la faculté de léviter, ou des mouettes qui volent chez toi… mais …A quel point tu en fais le maximum à la prise de vue : est-ce que t’as des petites astuces secrètes ? Et à quel point tu laisses ça pour la retouche ?

J : Il y a absolument les deux : en fait ça dépend des photos. Il y a des photos qui sont des montages à 100% et d’autres qui sont juste des astuces : on croit que c’est des montages mais en fait non, c’était juste des astuces au moment de la prise de vue. Il y a vraiment des deux quoi ! Si je peux le faire à la prise de vue et bien je vais le faire ; et si c’est impossible, mais que j’ai quand même envie de faire cette image, je ne vais pas me priver de recourir au montage

L : D’accord, c’est intéressant : c’est quand même d’abord la prise de vue si possible …

J : Oui parce que c’est un petit challenge. Maintenant ce n’est pas toujours …parfois le montage ne se voit pas, parfois il se voit. J’essaye de brouiller un peu la frontière entre les deux.

L : T’as un exemple d’image où c’est une astuce seulement, où il n’y aucun… ?

Julie de Waroquier photo papillons libertéJ : Oui, je vais en trouver une… avec des papillons…celle-là ! Celle-là en fait : on dirait qu’il y a des papillons qui volent et on dirait que c’est un montage, en fait c’est juste de faux papillons en papier que j’ai scotchés sur ma main et sur le mur : et en fait, vu que c’est une profondeur de champ, j’étais à f/1.4 quoi ! Donc du coup c’est juste assez flou pour qu’on y croie.

L : Effectivement, là je me suis demandé : si c’est du trucage, c’est un beau travail. Mais du coup effectivement c’est une astuce : c’est intéressant !

Est-ce que tu as déjà une idée très précise de l’image que tu veux obtenir avant, ou est-ce que tu te laisses parfois porter à la prise de vue, ou tu improvises parfois en partant d’une idée de départ?

J : Il y a les deux. 90% du temps, je sais ce que je veux faire, j’ai un schéma. Maintenant parfois je me rends compte que ce n’est pas réalisable, donc je laisse le hasard venir, je dis bon je vais improviser et parfois je pars en disant je vais voir ce qui se passe : voilà, j’aime bien cette lumière, j’aime bien cet objet, je vais tenter. Mais ce ne sont pas les plus réussies en général. En général j’essaye vraiment de préparer, d’avoir une base, tout en laissant vraiment une ouverture pour l’imprévisible et l’imprévu.

L : Ben voilà écoute merci Julie pour toutes ces réponses.

J : Merci à toi !

L : C’est intéressant aussi par rapport à ton travail aussi parce que je le connaissais déjà, je pense qu’il y a des lecteurs qui te connaissaient déjà, parce que sur le web t’as quand même ta petite réputation. C’est intéressant d’avoir déjà un livre imprimé avec du papier qui est très joli : c‘est quand même autre chose. Et de voir un petit peu ta démarche derrière.
Donc n’oubliez pas le livre de Julie « Rêvalités » qui n’est même pas encore sorti !

J : Dans 2 jours !! Mais on peut déjà le commander !!!

L : Donc imprimé sur un très beau papier et plein de jolies images, ça fait un beau cadeau pour vous-même ou quelqu’un à l’approche de Noël si vous voulez un beau livre photo qui réchauffe un peu le cœur en hiver autour d’un chocolat chaud !

J : Merci beaucoup !!!

L : A bientôt sur le blog.

 

 

Laurent Breillat
J'ai créé Apprendre.Photo en 2010 pour aider les débutants en photo, en créant ce que je n'avais pas trouvé : des articles, vidéos et formations pédagogiques, qui se concentrent sur l'essentiel, battent en brêche les idées reçues, tout ça avec humour et personnalité. Depuis, j'ai formé plus de 14 000 photographes avec mes formations disponibles sur Formations.Photo, sorti deux livres aux éditions Eyrolles, et édité en français des masterclass avec les plus grands photographes du monde comme Steve McCurry.
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