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Bonjour à toutes et à tous, ici Laurent Breillat pour Apprendre la Photo, et bienvenue dans cette nouvelle vidéo, qui m’a été inspirée par ce qui est sans doute LE film de l’été : Kaamelott Premier Volet.

J’imagine que vous connaissez, mais au cas où : Kaamelott est à l’origine une série télé diffusée sur M6 entre 2005 et 2009, et créée par Alexandre Astier. Elle se base sur la légende du Roi Arthur, et est devenue un monument de la pop culture française, donnant naissance à environ… oh, 50 % des memes francophones je pense !

Depuis 2009, tous les fans attendaient la suite avec impatience, prévue pour prendre la forme de 3 longs-métrages qui sortiraient en salles. Notez qu’on a dû attendre un an de plus à cause de ce putain de covid. Mais, en même temps… on n’était plus à ça près. 🤷‍♂‍

Bon, pourquoi je vous parle de Kaamelott, et quel rapport avec la photographie ? Eh bien, aucun, merci d’avoir regardé cette vidéo et à bientôt sur Apprendre la Photo !

Plus sérieusement, ce que m’a inspiré le visionnage du film en salle cet été, ainsi que toutes les interviews d’Astier et de l’équipe que j’ai pu regarder, c’est l’intégrité TOTALE de l’artiste. Je vous PROMETS que ça a un rapport avec la photographie, mais il va me falloir laisser un peu le temps de dérouler mon raisonnement 🙂

 

Déjà, il faut savoir que Kaamelott a commencé comme une série comique en format 3 min 30, et que les deux dernières saisons ont complètement changé de format, avec des épisodes de 40-50 minutes à portée plus dramatique, et en tout cas dans un complet changement de ton. C’est un pari audacieux, mais c’était sa vision, donc il l’a fait.

Pour Kaamelott : Premier Volet (le film sorti en juillet, donc), Astier n’a fait aucun compromis pour matérialiser sa vision. Il a insisté pour utiliser une caméra Arri 65, en moyen format numérique, ce qui augmente tous les coûts, car son rendu était le seul qui retranscrivait les lumières et les costumes comme il le voulait (lui, et son directeur de la photo).
Il y a d’ailleurs une discussion sur le sujet sur YouTube : si vous êtes intéressés par les aspects un peu techniques du cinéma, c’est vraiment très cool ! Je vous mets le lien ici.

Astier a également composé la bande originale du film, parce que pourquoi pas. 🤷‍♂‍ Bon, évidemment, ça ne sort pas de son chapeau complètement, hein, il a fait de longues études au conservatoire et c’est un musicien chevronné, mais QUAND MÊME, imaginez la masse de travail de réaliser un film, en jouer le rôle principal, et EN PLUS de composer la musique. C’est tout juste si c’est pas lui qui conduit la camionnette pour ramener le matos sur le tournage.

Alors, évidemment, il ne fait pas tout tout seul, hein, il y a une équipe fabuleuse autour de lui. Mais s’il s’implique autant, c’est pour concrétiser au mieux SA vision. Et même dans ce qu’il ne peut pas faire lui-même, c’est insufflé par lui.

Si la caméra utilisée est une des meilleures disponibles actuellement (si ce n’est LA meilleure), c‘est parce qu’il considère que la comédie mérite tout autant une image exceptionnelle que d’autres genres.

D’ailleurs, le genre du film est presque indéfinissable à mon sens, ce n’est pas qu’une comédie, et là encore, c’est parce que c’est l’équilibre qu’il souhaite donner à son œuvre.

À la limite, qu’on aime ou pas n’est pas pertinent : il faut bien reconnaître que c’est un artiste ENTIER, pas seulement parce qu’il multiplie les casquettes (à la limite c’est accessoire ; il pourrait théoriquement trouver des gens qui amènent sa vision au bout, parce qu’il a très bien choisi, parce qu’il a très bien transmis sa vision, donc, à la limite, qu’il mette les mains partout, c’est plus signe que lui, il a envie de contrôler ça), mais la raison principale pour laquelle c’est un artiste entier, c’est parce qu’il est INTÈGRE.

Comme souvent, le dictionnaire éclaire beaucoup quand on veut discuter d’un concept, et y faire un tour évite en général d’asséner des contre-vérités avec beaucoup d’assurance au chaud dans ses chaussettes.

 

Dans le dictionnaire donc, on trouve 3 définitions d’intégrité qui se complètent à merveille :
A. État d’une chose, d’un tout, qui est entier, qui a toutes ses parties.
B. État de ce qui est sain, intact, qui n’a subi aucune altération, aucune atteinte.
C. Caractère, qualité d’une personne intègre, incorruptible, dont la conduite et les actes sont irréprochables.

 

Tout est dit : Astier est entier, il vient tel qu’il est avec sa vision de son projet, et n’en démordra pas, parce que c’est comme ça qu’il le voit.
En anglais on parle souvent de “work ethic”, “éthique de travail”, et il y a quelque chose de ce goût-là, mais je trouve que le terme d’intégrité est plus complet.

Alors, comment ça se relie à la photo et pourquoi je vous parle de ça depuis cinq minutes ? Eh bien, je pense tout simplement que c’est l’une des qualités premières d’un artiste. Avoir une vision claire de ce qu’on veut faire, et s’y tenir, à la fois en termes de choix dans son travail, mais aussi en termes de quantité de travail : car il ne suffit pas d’avoir une vision, il faut aussi bosser pour la rendre réelle.

On peut prendre plein de grands photographes au hasard et constater leur intégrité.

Pour rester sur les artistes auxquels on a déjà consacré un Incroyables Photographes, on peut commencer par Gregory Crewdson, qui met en place de véritables mises en scène cinématographiques pour ses photographies, avec une équipe entière, des lumières, de la fausse pluie s’il le faut, une grue, et qui photographie uniquement au très grand format 20×25, et en prend plusieurs pour être sûr d’avoir tout ce qu’il faut, quitte à les fusionner numériquement ensuite. Donc on peut dire qu’il y met les moyens.

 

On peut citer Nick Brandt, qui photographie au Pentax 67, sans long téléobjectif, et utilise une technique dont on n’est pas trop sûr pour obtenir un flou particulier sur ses images, pour finir par les tirer en très grand format avec la technique du platine palladium, qui donne un rendu très particulier.

 


Andreas Gursky qui réalise des tirages gigantesques et n’hésite aucunement à recourir à la retouche numérique pour obtenir des images parfaites dans de si grands formats.

 


Stephen Shore qui cherche à radicalement reproduire la sensation de voir dans American Surfaces, en ne prenant aucun soin à faire des cadrages travaillés au millimètre,

et fait ensuite quasiment exactement l’inverse dans Uncommon Places, où il cherche à mettre le maximum d’informations dans une photographie pour explorer à fond son pouvoir descriptif.


On pourrait se dire que c’est contradictoire, il n’est pas intègre, Shore, il fait des trucs différents, mais en fait non : il l’explique en conférence, il s’intéresse au médium photographique et à ses possibilités, et chaque projet est l’occasion d’en explorer un aspect différent (ce qui implique en l’occurrence un dispositif photographique et une démarche différents).

Ou Josef Koudelka qui a passé une bonne partie de sa vie à vivre comme un véritable vagabond et à dormir dehors, carrément, pour son art.


Bref, vous le voyez : ce qui distingue ces artistes des autres, c’est leur vision claire et radicale, de laquelle ils ne dérogent pas.

 

Alors attention : intégrité ne veut pas dire absence de doute ni absence d’évolution.
Il est normal que si vous commencez à travailler le côté artistique de vos photos, vous n’ayez pas encore une vision claire et radicale de ce que vous allez faire. Là, on a parlé d’artistes qui étaient largement accomplis. Moi non plus, j’ai pas une vision claire. Il y a une période de construction. C’est normal.

Les artistes ne démarrent pas avec une vision complète qui leur tombe du ciel. Meyerowitz a commencé la photographie simplement parce qu’il avait trouvé Robert Frank fascinant. Au départ, il n’avait pas une vision claire de ce qu’il allait faire. Picasso n’a pas inventé le cubisme dès sa seconde toile. Mais par la suite, les artistes développent leur propre vision et s’y tiennent.

Et quand je dis qu’ils s’y tiennent, ça ne veut pas dire qu’elle n’évolue pas. En fait, c’est même souvent plutôt mauvais signe s’il n’y a aucune évolution : c’est particulièrement visible en musique quand les albums d’un même artiste se suivent et se ressemblent.
Simplement, il y a une forme de continuité et de cohérence qui viennent de l’intégrité de l’artiste.

Voilà, je voulais partager cette réflexion avec vous, car ça m’a tourné dans la tête pendant quelques semaines après le film, et j’ai dû l’écrire pour vous en faire une vidéo. J’ai une grande admiration pour les gens avec une vision claire et qui bossent beaucoup pour l’accomplir, et ça m’a rappelé que c’était peut-être une idée qu’il serait utile que je mette en avant sur la chaîne.

Avant de terminer, je voudrais vous rappeler que la campagne de crowdfunding est en cours pour mes carnets de voyage, mon premier “livre” de photographies, sur lequel j’ai essayé d’être un artiste intègre. Toutes les infos sont sur cette page !

Dépêchez-vous, car il ne reste plus qu’une semaine pour les commander, et ensuite ils ne seront plus produits. J’ai décidé d’arrêter là, après la campagne de crowdfunding, je ne vais pas faire du stock.

Si vous avez aimé cette vidéo, pensez à mettre un pouce bleu et à la partager autour de vous, c’est important !
Si ce n’est pas encore le cas, pensez à vous abonner pour ne pas rater les prochaines vidéos, et à télécharger votre guide gratuit “Osez Composer” pour vous aider à mettre en place votre vision 🙂

Je vous dis à plus dans la prochaine vidéo, et d’ici là à bientôt, et bonnes photos !

 

 

Pascale Sadoul
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