Ces derniers temps, j’ai eu le sentiment via vos commentaires et vos mails que pas mal d’entre vous utilisaient systématiquement le mode manuel de leur appareil, voire la mise au point manuelle. C’est une très mauvaise idée, et voyons pourquoi.

Je ne sais pas trop d’où cette idée peut venir. Probablement d’un savant mélange entre des gens qui affirment que « quand on est un vrai photographe on fait son exposition et sa mise au point manuellement », ceux qui vénèrent Leica, et ceux qui pensent que c’était mieux avant, quand on avait que des argentiques tout manuels.

Pour être tout à fait franc, je pense que c’est complètement ridicule, et encore je suis très poli. En utilisant le tout manuel, je pense que vous allez surtout vous frustrer plutôt que de progresser, et que vous avez mieux à apprendre que de deviner les paramètres de l’exposition idéaux pour une scène comme ça, à l’instinct.

Le mode M

PENTAX mode manuel appareil photo molette réglage

Ne tombez pas non plus dans l’extrême inverse 😛
PENTAX K-x mode dial 22 by HAMACHI!

Commençons par le mode M, qui semble pas mal utilisé y compris par des photographes débutants. Qui après s’étonnent que leurs photos soient mal exposées.

Alors oui, de nombreux grands noms de la photographie ont utilisé le tout manuel. Et vous savez pourquoi ? Parce qu’il n’y avait rien d’autre ! Les cellules qui mesuraient automatiquement l’exposition et permettaient des modes comme la priorité à l’ouverture ou à la vitesse sont finalement arrivées relativement tardivement.

Mais aujourd’hui, nous avons la chance d’avoir entre les mains pour un prix relativement modique des systèmes capables de déterminer une exposition correcte de façon très précise.

Alors vous allez me dire :

Oui, mais tu prônes quand même de ne pas laisser l’appareil décider à notre place, ça ne va pas limiter notre créativité de s’en remettre aux automatismes de l’appareil ?

Oui, je le prône, et ce n’est pas près de changer. (Au passage, le système des nouveaux Nikon J1 et V1 censé choisir à votre place la meilleure photo parmi une série à votre place est une aberration pour moi.)

Seulement ces automatismes, vous en avez quand même le contrôle via divers mécanismes. Il suffit de les connaître. Si vous savez que vous souhaitez telle ouverture et c’est tout, je ne vois pas l’intérêt de déterminer vous-même la vitesse d’obturation. Au risque de me répéter, la mesure d’exposition de l’appareil fait ça très bien.

Et si elle se trompe, vous avez 3 outils très simples à utiliser qui vous permettront de faire ce que vous voulez dans bien des cas :

Rien qu’avec ça, vous pouvez régler 99% des cas où la mesure d’exposition se plante lors d’un premier essai. Et ces cas restent relativement rares.

Alors oui, parfois, la mesure d’exposition n’y arrive plus, parce que les conditions de lumière sont trop difficiles. Et dans ce cas-là, je vous dis au contraire : n’ayez pas peur de reprendre le pouvoir et passez en mode M !

Ça m’est arrivé, mais uniquement dans des situations où c’est indispensable parce que mon appareil s’emmêle les pinceaux. Typiquement en concert par exemple (et encore, ce n’est pas toujours obligatoire).

Bref, je ne vois pas pourquoi vous compliquer la vie avec ça. Si vous shootez en mode M, c’est du temps que vous ne passerez pas à composer votre image, et vous pourriez bien rater le moment décisif en plus de ça. Et ça ne fait pas de vous un « sous » photographe ! Si vous voulez mon avis, ce qui fait un bon photographe ou pas, ce n’est pas l’appareil ou le mode qu’il a utilisé, c’est la photo finale. Point barre. Comment vous y arrivez, franchement, on s’en fout.

La mise au point manuelle

Alors oui, au bon vieux temps, on shootait en mise au point manuelle. En même temps, il n’y avait pas d’autofocus. Et puis surtout, vous avez déjà regardé dans le viseur d’un vieux reflex argentique, même d’une gamme plutôt « grand public » ? C’est gigantesque, très clair et lumineux, bref rien à voir avec les viseurs de nos reflex actuels, qui ne représentent pas 100% de l’image, sont relativement sombres, bref totalement inadaptés à la mise au point manuelle.

En ce qui me concerne, je suis bien content d’avoir un autofocus performant qui me permet de faire la mise au point rapidement et précisément où je veux dans l’image. Les systèmes d’aujourd’hui sont extrêmement performants, mais comme tout automatisme il faut savoir les maîtriser, et vous avez une emprise dessus. J’ai déjà écrit sur l’autofocus par le passé, et plus récemment sur la sélection manuelle du collimateur. Rien qu’avec ça, vous réussirez 99% du temps à faire la mise au point où vous le souhaitez.

Alors évidemment, ce système n’est pas parfait, mais par rapport à la mise au point que vous arriveriez à effectuer en mode manuel, c’est largement meilleur ! Je ne sais pas vous, mais moi dans le viseur de mon 550D, la plupart du temps je ne suis pas capable de voir suffisamment précisément l’endroit le plus net de l’image. Je suis myope ok, mais enfin je pense que pour la plupart d’entre vous ça doit être la même chose 😛

Donc dans la plupart du cas, utilisez l’autofocus, mais à bon escient. Personnellement, j’utiliserai la mise au point manuelle en macro, où la profondeur de champ est si faible qu’on voit bien l’endroit le plus net de l’image, et dans des situations où j’ai particulièrement le temps.

Par exemple, si je fais un paysage en réglant tout tranquillement sur mon trépied, je peux me permettre d’activer le Live View, de zoomer à 10x, et de faire la mise au point manuelle, pour être sûr d’avoir la meilleure netteté possible.

Mais dans la plupart des situations photographiques, vous n’aurez ni le temps ni la capacité de l’utiliser correctement. Alors fiez-vous à l’autofocus, vous l’avez payé assez cher 😉

Voilà, tout ça pour dire de ne pas avoir peur du manuel, mais de ne surtout pas en faire une doctrine ridicule qui voudrait qu’on soit un « vrai » photographe qu’en shootant en manuel. Il faut savoir vivre avec son temps (sans non plus tomber dans ses travers 😉 ) Shootez en manuel si vous en avez besoin, ou pour expérimenter. Pas tous les jours.

P.S. : Si vous aimez l’argentique et que vous pensez à me descendre en flammes là tout de suite, prenez en compte que je vais aussi goûter à ses joies très bientôt, faut que je m’achète de la pelloche 😉

Et n’oubliez pas de partager l’article ! 🙂

 

 

Laurent Breillat
J'ai créé Apprendre.Photo en 2010 pour aider les débutants en photo, en créant ce que je n'avais pas trouvé : des articles, vidéos et formations pédagogiques, qui se concentrent sur l'essentiel, battent en brêche les idées reçues, tout ça avec humour et personnalité. Depuis, j'ai formé plus de 14 000 photographes avec mes formations disponibles sur Formations.Photo, sorti deux livres aux éditions Eyrolles, et édité en français des masterclass avec les plus grands photographes du monde comme Steve McCurry.
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