On continue la série des conférences du Salon de la Photo avec celle de Régis Moscardini, du blog Auxois Nature, sur la photo animalière.



 

Transcription texte de l’interview :
Bonjour à tous. Laurent l’a dit, je suis Régis Moscardini. Je suis photographe animalier. Je tiens un blog de photographie animalière : auxoisnature.com , sur lequel je donne des conseils, des interviews de photographes animaliers. Je suis instituteur, mais depuis deux ans je suis en disponibilité pour création d’entreprise ; j’ai créé, il n’y a pas très longtemps, une formation pour les photographes animaliers, en ligne.
(Si vous avez des questions sur mon intervention au fur et à mesure, n’hésitez pas, levez la main et je vous interrogerai si vous le voulez.)

Avant d’aller plus loin, un petit sondage : est-ce que certains, ici, pratiquent déjà la photo animalière de manière assez régulière ?
Il y en a pas mal ; il y a des têtes que je connais un peu et je pense que vous devez me connaître aussi.
Est-ce qu’il y en a qui n’ont jamais fait ça, pour qui c’est totalement obscur et qui ne connaissent pas du tout ce champ de la photographie ?
D’accord. À perfectionner.
Ce qu’on va apprendre pendant la petite demi-heure que l’on a devant nous :
– Les cinq étapes quand on part de zéro, qu’on n’a vraiment jamais pratiqué : les cinq étapes à respecter ;
– Les deux pratiques de terrain incontournables pour bien faire, et ne pas faire d’erreurs ;
– Le matériel spécifique, pour la photo animalière.

Et on finira par une séance de questions/réponses.

Mais je vous le redis, si vous avez des questions, que je ne suis pas très clair sur un point pendant l’intervention, vous levez la main et on essaiera de clarifier les choses.

Avant d’attaquer les cinq étapes, le premier point de l’intervention, on va essayer de définir ensemble ce qu’est la photographie animalière. Certains sont déjà bien au fait là-dessus, d’autres un petit peu moins.

Qu’est-ce que la photographie animalière ?

Je vais vous montrer trois photos, et parmi ces photos, vous devrez me dire quelle est, ou quelles sont les photos qui correspondent à de la photographie animalière.
Je vous les montre et je vous les décris très rapidement :

un lapin de garenne en contre-jour, un autre lapin de garenne dans son environnement, et ici trois charmantes vaches charolaises prises en Bourgogne, dans l’Auxois, en hiver.
Je vous laisse 10 secondes pour essayer de trouver quelles sont, d’après vous, ou quelle est celle qui correspond à de la photographie animalière.
Qui pense que c’est la 1 qui est de la photographie animalière ?
La 2 ? La 3 ?
Qui pense que ce sont les trois ? Beaucoup de monde ? On va vérifier ensemble.

Petite analyse rapide avant d’avoir les réponses :
La photo numéro 1 est la photographie d’un animal sauvage, en mettant l’accent sur le côté artistique.
Photographie numéro 2, un animal sauvage également, mais là on a mis l’accent sur le côté naturaliste, descriptif.
Photographie numéro 3, la photographie d’un animal domestique, en l’occurrence des vaches charolaises.

Vous aviez raison, les trois photos correspondent toutes à de la photographie animalière. On va voir pourquoi.

La définition : la photographie animalière, c’est l’art de photographier des animaux sauvages ou domestiques, dans le but de montrer leur comportement, leur beauté, leur environnement. Souvenez-vous…
Photo 1 : c’est un animal sauvage et on montre plutôt sa beauté, son environnement un petit peu, car il y a quelques touffes d’herbe par-ci par-là,
Photo 2 : un animal sauvage, toujours, dans laquelle on insiste sur l’environnement,
Photo 3 : animal domestique, et on est plutôt sur le comportement, pourquoi pas la beauté, parce que la photo est agréable à regarder, et pas beaucoup d’environnement.
On voit que chacune de ces trois photos peut être mise dans la définition.

Alors, le problème – ce n’est pas réellement un problème – c’est que la définition qu’on vient de voir à l’instant est un peu trop générale pour ce qu’on va faire aujourd’hui ensemble. Et la photographie animalière telle qu’on la conçoit le plus souvent, c’est : photographier des animaux sauvages (on exclut les domestiques) avec un point de vue artistique et subjectif (on exclut le naturaliste et le descriptif) dans le but de les sublimer. Je parle des animaux, évidemment. Là, on a recentré la définition et on est sur le sauvage, sur l’artistique pour les sublimer, montrer leur beauté.

Pour illustrer cette définition, je vous propose de voir deux photographies de Fabien Gréban. Toutes les photographies que vous verrez ici sont de moi, sauf mention contraire, et en l’occurrence, ici, c’est Fabien Gréban, photographe professionnel (certains le connaissent).

Première photo : un chamois pris en contre-jour. Ici, on est clairement dans la photographie animalière puisqu’on voit assez peu son environnement – on imagine quand même qu’il est sur un point élevé, car il domine et il y a une belle vue derrière -, on distingue quelques touffes d’herbe, mais ce qui marque vraiment, ce n’est pas son comportement, ce n’est pas l’environnement, c’est la beauté de la photo, le côté artistique, subjectif, les couleurs, et surtout le détail de la petite auréole dorée qui marque bien la tête de l’animal. Là, on n’apprend pas grand-chose sur sa vie, par contre on est attiré par la beauté de l’animal et de la photographie.
Deuxième photo : un bouquetin, toujours de Fabien Gréban. On n’apprend absolument rien sur l’environnement parce que c’est tout noir; on apprend un peu plus sur le comportement, il a une posture un peu particulière, mais surtout, c’est l’aspect clair-obscur qui donne beaucoup de force à l’animal, avec le contraste sur le côté gauche de la tête du bouquetin et surtout la corne sur laquelle on a beaucoup de contraste et qui confère beaucoup de force à la photographie. L’œil est plus attiré par la beauté de la photo que par l’animal en lui-même.

Avant d’attaquer les cinq étapes, une chose très importante. Certains doivent avoir conscience de ça, d’autres un peu moins. Pour insister là-dessus, le respect de l’animal quand on le photographie, je vous propose un extrait de ma formation avec Fabien Gréban. Ça va durer 5 minutes :

” Ce qu’il faut éviter, c’est le dérangement systématique sur un secteur répété, jour après jour. Ça peut être problématique pour certaines espèces et même pour certains milieux, par rapport aux piétinements. Ce qu’il faut essayer de faire, c’est d’avoir plusieurs secteurs et d’alterner. Si dans un coin donné, on a dérangé un chat forestier durant sa chasse, il faut le laisser tranquille pendant plusieurs jours. Et c’est aussi pourquoi je n’aime pas parler des endroits où je fais de la photo. Ce n’est pas par secret, c’est pour préserver le milieu. Pour éviter d’exercer une pression trop forte sur des espèces sur des endroits très précis de nature. Les photographes qui pratiquent ce type de photographies et aussi pour l’affût, il faut toujours avoir en tête le respect du milieu dans lequel on est. Toujours. On photographie des êtres vivants. On peut faire ça de manière égoïste, mais ça ne marche pas longtemps. Pour moi, une session photo réussie, c’est quand je fais un affût ou une approche, que je fais une photo qui me plaît et que l’animal s’en va sans avoir détecté ma présence. Là, c’est une séance réussie. Si je fais une belle photo, mais que l’animal m’a détecté et fuit, je n’ai pas le même sentiment de satisfaction. D’accord, j’ai fait mon image, mais j’ai pas fait le boulot, il manque quelque chose. ”

C’est assez clair, il y a une phrase de Fabien qui est marquée : surtout en hiver, quand on fait de la photographie, le photographe va le photographier et lui, à la fin de la séance, va rentrer bien au chaud chez lui, mais pas l’animal. Avoir conscience de ça : le respect de l’animal est le plus important.

Les cinq étapes

Étape 1 : un petit indice, pas très parlant, pas très explicite, un point d’interrogation. Ceux qui connaissent la réponse (il doit y en avoir), laissez réfléchir les autres. Quelle pourrait être, à votre avis, cette étape n°1 quand on souhaite photographier les animaux ?

La première étape est de choisir son sujet. Ça peut paraître très bête, mais il faut choisir son sujet. On ne part pas comme ça sans rien avoir en tête. Pour le choisir, il y a des contraintes, des aides, on ne fait pas ça comme ça.
Premièrement, ses envies. Par exemple, j’aime beaucoup les petits mammifères, les petits carnivores, les chats forestiers, les renards, je vais donc m’orienter là-dessus. Je suis moins batraciens, donc je ne vais pas m’orienter sur ces animaux-là.
Ensuite, le temps que vous avez à disposition. Si vous n’avez pas beaucoup de temps, pas la peine d’aller photographier la buse, qui demanderait beaucoup de temps d’affût, de préparation sur place, c’est beaucoup trop long. Par contre, si vous avez peu de temps, faire de la proxiphoto ou la macrophotographie des petits insectes de son jardin, c’est tout à fait possible.
Son matériel. Si vous avez la chance d’avoir un gros 500mm, vous pourrez alors faire des portraits de rapaces, par exemple. Si vous avez un 70-200, par exemple, ce sera beaucoup plus difficile, vous pourrez plus faire de la photographie d’environnement, d’ambiance.
La difficulté – c’est très important également. Il y a des animaux qui sont plus difficiles à approcher. Le chat sauvage, c’est très difficile, par contre, la mésange sur la mangeoire, c’est beaucoup plus simple. La difficulté aussi est très importante, il faut en tenir compte.
Et puis, son lieu d’habitation. Évidemment, si on habite sur le littoral, on ne va pas aller photographier le lynx, ce serait trop difficile. On va donc s’orienter sur des animaux près de chez soi. C’est plus simple par rapport aux déplacements, et on gagne beaucoup de temps, également.
Voilà pour l’étape 1. Des questions ? Des remarques ?
Ça ne prend pas beaucoup de temps, cinq minutes, mais il faut le faire.
Une fois qu’on a fait ça, on passe à

Étape 2 : un petit indice, peut-être plus parlant que tout à l’heure. La première de couverture d’un guide naturaliste des mammifères d’Europe, d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Une idée par rapport à l’étape numéro 2 ? Qu’est-ce qu’il faudrait faire, à votre avis, après l’avoir choisi ?

Le connaître, c’est ça. On l’a choisi, il faut le connaître.

Connaître quoi ? Son comportement, c’est-à-dire comment il se comporte dans la vie de tous les jours, ses heures de lever, ses heures d’activité essentiellement (si c’est la nuit, la journée), quand il est actif.
Son lieu de vie, c’est très important. Est-ce qu’il vit plutôt en forêt, en plaine, en montagne ? Ces choses qui sont basiques, mais très importantes.
Sa morphologie. Ça peut paraître bête, dit comme ça ; effectivement, on sait tous à quoi ressemble un renard, pas la peine d’aller voir des photos, mais il y a des animaux pour lesquels on ne sait pas trop à quoi ils peuvent ressembler. Peut-être que certains ne savent pas à quoi ressemble un geai des chênes, et si on veut le photographier, il faut avoir une idée en tête de sa morphologie.
Et les indices de présence. Tout est important, mais ça, ça l’est peut-être plus. C’est toujours dit dans ce genre de guide, savoir comment faire pour le retrouver sur le terrain. Quelles traces, en théorie, il laisse sur le terrain. On verra après qu’il y a plusieurs types d’indices de présence.
Comment faire pour avoir tout ça ? Il y a des livres spécialisés, comme, par exemple, les guides Delachaux et Niestlé qui sont très bien, très réputés pour ça. Il y a également internet (il ne faut pas avoir honte d’utiliser ça) Wikipédia est une très bonne porte d’entrée pour commencer à avoir des informations sur des animaux en particulier. Et pourquoi pas, si on a le temps et l’envie, d’aller voir dans des associations, comme la LPO, par exemple, ça peut être aussi très pratique.

Étape 3 : Un nouvel indice. On l’a choisi, on le connaît, que faut-il faire maintenant, d’après vous ?

On le repère. Cette fois-ci, on va sur le terrain, on ne le photographie pas encore, on a en tête (on note) tout ce qu’on a pu voir en théorie sur l’étape 2 et on va essayer de retrouver, sur le terrain, les possibilités de présence de l’animal. Là, en l’occurrence, c’est une garenne. Je sais que les garennes vivent plutôt dans un espace ouvert, je suis donc allé dans un espace ouvert et – ce n’est pas que de la chance parce que j’ai quand même beaucoup observé et repéré pendant mes randonnées – j’ai trouvé des indices de présence implacables : des entrées de terriers, des remblais, des crottes, des indices de présence potentielle.

Grâce à quoi puis-je repérer les animaux que je souhaite photographier ?
Par apport aux indices sonores. Ce n’est pas valable pour tous les animaux — pour le lapin, ça ne l’est pas du tout —, mais c’est souvent le cas. L’exemple, c’est la chouette en pleine nuit. Vous veillez un peu le soir, vous ouvrez la fenêtre, l’été, et dans la campagne on entend souvent les chouettes. Et c’est bien pour les repérer.
Indice de présence visuel. Ici, on en a un, ça peut être les entrées de terrier, des laissés (ce que l’on appelle des laissés, ce sont les crottes), des présences de poils, souvent sur les fils de fer barbelés. Ça peut être des indices de présence indirects : comme, par exemple, les campagnols qui laissent de petits monticules (genre monticules de taupes). S’il y a des campagnols, il y a vraisemblablement des renards ou des chats sauvages parce qu’ils les mangent.
Autres indices de présence visuels indirects, on a les copeaux laissés par les pics qui vont creuser le bois et laisser des copeaux. Ça, ça ne s’invente pas et il faut le savoir si on veut connaître l’animal.
Les indices de présence olfactifs, c’est plutôt rare. Nous fonctionnons beaucoup, êtres humains, avec les yeux. Un peu avec les oreilles, surtout avec les yeux, et pratiquement pas avec le nez. Le renard sent fort, mais si on sent le renard, c’est que vraisemblablement on a repéré avant son terrier, sa présence.

Donc, je l’ai choisi, je le connais, je l’ai repéré. Je ne suis pas sûr qu’il est là ; normalement oui puisque je suis allé sur le terrain et que j’ai vu des indices de présence.

Étape 4 : à votre avis, que faut-il faire ? L’observer.
L’observer sur le terrain. Encore une fois, je ne prends pas mon appareil photo (je peux le prendre “parce qu’on ne sait jamais”).
Avant de faire défiler tout ça, la chose la plus importante est que je le fais à distance. Le but n’est pas de le photographier, mais de voir ce qu’il fait. De le voir, déjà, pour être sûr qu’il est là, et après de voir ce qu’il fait. Donc je me mets à bonne distance. Pour un mammifère, je me mets contre le vent, c’est-à-dire que j’ai le vent en face de moi pour que mon odeur soit emportée derrière moi et pas en face.
Sortir souvent et régulièrement. Il ne s’agit pas d’une sortie. Avec un peu de chance, on peut voir l’animal, mais si on ne le fait qu’une fois, il ne sera peut-être pas là, et il ne faudrait pas en tirer des conclusions hâtives. Il est peut-être là, mais on ne l’a pas vu.
À différents moments de la journée. Il est peut-être plus actif le matin que le soir. Ou l’inverse. Ou en pleine journée, ça arrive pour certaines espèces. Tout à l’heure, je parlais du temps qu’on a à y consacrer, on est clairement là-dedans. Si on a beaucoup de temps, on peut faire tout ça. Pas beaucoup de temps, on sera moins actif là-dessus et ce sera plus dommageable pour la suite.
En prenant des notes. Ça peut être des notes manuscrites, ou sur son smartphone, on peut aussi enregistrer ce qu’on raconte. Quelque chose que je fais moins maintenant, mais que je faisais au début, je filmais (avec un caméscope de base) et je regardais après coup sur l’ordinateur à tête reposée, et je voyais des choses que je n’avais pas vues sur le moment.

Voilà pour la partie observation qui est super importante. Ici, le but est de valider la présence effective de l’animal. J’ai vu en théorie qu’il pouvait être là, maintenant je le valide, en vrai. S’il n’est pas là, je reprends l’étape numéro 3 “je le repère”.

Étape 5 : à votre avis ? Je le photographie. Là, on se rend compte, quand même, qu’on a fait les étapes 1, 2, 3, et 4 et qu’on n’a pas pris, en théorie, une seule fois son appareil photo. Ce n’est qu’à l’étape 5 qu’on peut enfin le photographier. Si chacune des étapes a été bien réalisée.
C’est super important, si vous allez dans la nature en espérant pouvoir faire des photographies comme celle-ci ou celles vues avant, c’est mort. Parce que la vie sauvage, chez nous, en France, dans nos pays occidentaux, la faune est vraiment pourchassée et subit une pression humaine depuis très longtemps. En gros, la faune a peur des hommes depuis des siècles. Donc , par rapport à ça, on ne peut pas, nous, en tant que bipèdes, aller la fleur au fusil photographier l’animal. Il faut prendre tout un tas de dispositions et suivre tout un cheminement pour arriver, enfin, à la photographie. Ça peut être long, un peu fastidieux. Ceci étant, il y a quand même des étapes assez sympathiques, notamment celle de l’observation, où, si ça se passe bien, si on voit l’animal, ce sont vraiment des moments sympas de voir l’animal qui est là, qui ne se doute pas de votre présence et qui vit sa vie. C’est vraiment chouette de voir un lapin de garenne avec un autre lapin en train de batifoler.

On continue. Deuxième grande partie de cette intervention.

Il existe deux façons de photographier la nature sauvage.

On a fait les cinq étapes, on peut passer à la suite.

Première façon : à l’affût. Notre ami Fabien Grébant, qui est ici à l’affût.
Et toujours Fabien, qui est ici à l’approche.
On va voir ensemble ce qu’est chacune de ces deux méthodes.
À l’affût : méthode où le photographe est à l’abri des regards dans sa cache (qui peut être très simple ou plus élaborée). Ici, c’est l’animal qui vient vers le photographe, malgré lui. Si l’affût a été fait dans les règles de l’art, l’animal vient vers l’affût sans savoir qu’il y a un photographe.
Les avantages de l’affût par rapport à l’approche :
– permet une immersion complète dans la vie sauvage. L’animal ne sait pas qu’on est là, on le voit donc évoluer comme si on n’était pas là.
– on dérange peu ou pas les animaux. Le peu, c’est pas le mieux, qui est de ne pas déranger les animaux, évidemment.
– permet d’obtenir des images magnifiques, en tout cas sur le comportement. Je vous le redis, l’animal ne sait pas qu’on est là, donc il vit sa vie et on peut vraiment prendre des photographies avec des animaux qui ont un comportement naturel. Rappelez-vous la toute première image. C’est un lapin de garenne pris à l’approche, et le lapin n’est pas dans une attitude naturelle. La photo est jolie, il y a un beau cadre, elle est nette, mais il n’y a pas un comportement sympathique.

Mais il y a une contrepartie à l’affût (en photographie, il y a toujours un “mais”) :
– ça nécessite un repérage rigoureux en amont. Si vous pensez mettre un affût au hasard, en pensant que si vous êtes cachés, de toute façon, les animaux viendront à vous, ça peut marcher, comme pas du tout. Il faut d’abord avoir observé l’endroit, à distance, et voir des allées et venues qui vont justifier de mettre un affût ici.
– Ensuite, ça demande un dispositif particulier, l’affût, en l’occurrence. Qui peut être très simple, comme plus élaboré.
– Et puis, ça oblige à attendre, parfois sans voir grand-chose, même sans rien voir du tout. Mais c’est la photo animalière, on ne décide pas de ce qui se passe en face, c’est la nature.
Un petit extrait, toujours par Fabien, sur l’affût :

” Pour placer un affût, toujours dans l’optique d’un affût à mammifères ; là, on est dans une prairie bordée de haies, je vais donc utiliser les haies pour me cacher, me mettre à l’affût dans la haie. Voilà la zone que je veux “affûter”, avec la lisière de la forêt devant nous et sur le côté, et cette prairie, ici, qui va attirer les animaux qui vont venir se nourrir, ou chasser, ou simplement la traverser.
C’est un secteur privilégié dans lequel j’ai fait du repérage et où je sais que les animaux passent.
Cette haie m’intéresse beaucoup, je l’ai préparée à l’avance, c’est un affût que j’utilise régulièrement. Dans une haie, je viens me faire une petite loge, un petit trou dans lequel je vais pouvoir me glisser. À l’aide d’un sécateur, j’ai coupé quelques branches. Ça ne pose aucun souci vis-à-vis du propriétaire, parce que les haies sont plutôt envahissantes, pour lui ; de toute façon, c’est quelqu’un que je connais et ça ne pose aucun problème. Pour cette petite loge dans laquelle je vais me glisser, je complète le camouflage à l’aide de filets, que je peux laisser en place.
Je place mon tabouret…
Un autre filet pour compléter et me masquer le plus complètement possible.
Après, il faudrait, théoriquement et d’une manière rigoureuse, placer le filet au-dessus. Personnellement, j’aime bien garder une petite fenêtre de vision, ça rend l’affût plus agréable, moins pénible.
Surtout, on n’oublie pas de se masquer le visage et les mains.”

Voilà, c’est un court extrait de la formation, c’est surtout une des façons de faire l’affût. Il y en a d’autres. Là, c’est très simple, on place un filet devant (il sait qu’il se passe des choses ici) et on attend. On peut faire des affûts plus élaborés, en dur, qui restent beaucoup plus longtemps. C’est aussi une façon de faire.

Maintenant, on passe à ce que l’on appelle la billebaude, qui est la photographie à l’approche.
Technique de photographie animalière à l’approche, en mouvement, au cours de laquelle le photographe part à la rencontre des animaux.

Cette fois-ci, le photographe n’est pas passif, c’est lui qui va à la rencontre des animaux.
Les avantages de cette technique :
– Il n’y a pas de dispositif particulier à avoir. Sauf avoir une tenue (comme on voit ici) neutre, ne pas avoir de vêtements colorés. Une tenue neutre, un peu camouflage, mais on peut avoir une tenue de randonnée habituelle, marron, ça peut suffire,
– Une technique facile à mettre en œuvre. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de dispositif particulier à faire. Ça ne veut pas dire que la technique est facile ! Qu’on va avoir forcément des résultats, mais elle est plus facile à mettre en œuvre que l’affût.
– Un gain de temps. Parce que, a priori, on peut aller sur le terrain sans avoir à créer son affût.

Mais
– Cette technique peut créer, et même crée, de la frustration chez le débutant. Elle en a créé chez moi quand j’ai commencé, parce que je faisais comme ça, je ne connaissais pas les techniques d’affût, et j’allais sur le terrain en pensant qu’il suffisait d’y aller pour avoir des résultats. Et c’est faux. Je vous l’ai dit, les animaux sont très farouches, on ne les a même pas repérés qu’eux nous ont déjà vus et sont partis. Donc, ça peut créer de la frustration chez le débutant.
– C’est une source de dérangement potentiel. Le simple fait d’être dans la nature est déjà un petit dérangement. Comme on est à l’approche, on ne reste pas sur les sentiers balisés, on va dans les endroits où le promeneur habituel ne va pas, et le simple fait de sortir des sentiers battus va amener notre odeur d’être humain là où l’animal n’a pas l’habitude de nous sentir et ça va le déranger.
– Nécessite une grande proximité avec le sujet. C’est une technique que je ne pratique pas beaucoup, Fabien non plus, parce qu’on estime que c’est un dérangement supplémentaire pour l’animal. Par rapport à son comportement, souvent, il est moins naturel. Parce qu’il peut nous avoir repérés (pas forcément fuir, mais nous avoir repérés). Et puis ce n’est pas une technique facile à mettre en œuvre, il y a des spécialistes. Par exemple, Fabrice Cahez, photographe animalier assez connu dans le milieu, a fait toute une série de portraits d’animaux qu’il voit de face. Donc, l’animal voit aussi le photographe. Il ne fuit pas, parce qu’il ne se doute peut-être pas que c’est un photographe. La photographie est superbe, un joli portrait pleine face, mais ce n’est pas un comportement naturel.
Il faut être conscient du dérangement potentiel.

Je vais laisser Fabien en parler, il le fera beaucoup mieux que moi :

” Il faut vraiment marcher avec un pas très léger, comme si on marchait sur des œufs. Même si le sol ne semble pas bruyant, il peut toujours y avoir une branche ou des feuilles qui sont bruyantes.
Avoir un œil vers l’avant, pour voir ce qui peut se passer, mais aussi sous ses pieds pour éviter de marcher sur la branche qui ferait de bruit.
Quand on sort d’une haie, c’est difficile de passer inaperçu. Si l’animal ne nous a pas sentis, ne nous a pas vus, avec la silhouette qui sort de la haie et qu’il regardait, malheureusement dans notre direction, il peut apercevoir un mouvement et ça va l’intriguer. Généralement, ce n’est pas un stimulus suffisamment fort pour l’inciter à la fuite, mais dans ces cas-là, il faut rester parfaitement immobiles, pas forcément dans des positions très confortables, pare qu’on se fige à un moment très précis, mais ça marche. L’animal peut, finalement, reprendre ses activités et oublier ce mouvement qui pouvait n’être, après tout, qu’un mouvement de branches. Mais ces instants où il faut rester figé et ne pas du tout bouger peuvent être assez longs et assez variables selon les espèces.”

Évidemment, pour l’approche, il y a des moments particuliers où c’est plus simple que d’autres. Si le terrain est humide, ce sera plus simple parce qu’on fera moins de bruit. En plein hiver, quand le sol est gelé, ça va faire craquer le sol ou la neige, donc il ne faudra pas y aller à ce moment-là.
Moi, je préfère l’affût. Quand je parle d’affût, je ne parle pas d’un truc compliqué long à mettre en place. Ça peut être une toile de camouflage tendue devant soi avec un trou dedans pour l’objectif, et ça peut être ça, l’affût. Je préfère ça, j’ai de meilleurs résultats, et j’aime bien parce que je dérange moins l’animal, et l’attitude qu’il peut avoir me paraît plus intéressante.

Le matériel

Ce n’est pas anodin que j’aie mis cette partie à la fin, parce que si on aborde tout de suite la question du matériel et pas celles des cinq étapes, des techniques de photographie de l’animal, c’est pas la peine d’avoir ce qu’a Fabien, un 500mm (donc gros). Si on n’a pas toutes les connaissances du début, ce n’est pas la peine d’avoir un matériel de ce type-là.
Je vais certainement enfoncer des portes ouvertes : rien de neuf, rien de nouveau.

Quel type d’appareil photo ?

Est-ce que les compacts peuvent convenir ? Ils ont des avantages : ils sont légers, maniables, donc portables, mais ils ont beaucoup d’inconvénients pour la photographie animalière. Une amplitude focale forcément limitée, impossibilité de changer d’objectif, visée par écran qui peut être problématique – en plein soleil, par exemple, et on est moins stable, car pas l’appareil contre le visage -, mais ça peut dépanner, parfois.
Pas pour la photo de la 5e étape, mais pour des observations ou pour des paysages. Si on a un appareil compact de type expert, qui photographie en mode RAW et s’il est complètement débrayable, on peut très bien photographier des paysages. Mais pour la photographie animalière, pas de compact.

Les bridges : On ne peut pas non plus changer d’objectif. Ils ont, malgré tout, une amplitude focale importante, on peut avoir un gros zoom (ici 24 fois), c’est dû au petit capteur, et il permet d’avoir de forts grossissements et d’obtenir des images correctes. Donc, si on a ça, qu’on débute en photo animalière, qu’on est intéressé par cette pratique-là, qu’on n’a pas envie d’investir pour le moment, on peut très bien commencer avec ce type d’appareils.

On arrive au reflex : (un changement dans l’ordre d’apparition, je mets tout et on en parlera après). Plus lourd, plus contraignant, mais évidemment, si on fait de la photo animalière, on sait qu’on va avoir ça en main.
Pus cher. Bien que les entrées de gamme sont dans les 400 euros, je pense, et il y a le marché de l’occasion qui peut être intéressant.
Qualité d’image supérieure, par rapport au compact et au bridge, qui est due au capteur, plus grand, et aussi (on va y revenir) aux objectifs. Une visée optique qui permet de voir ce que l’on va prendre réellement, et qui permet aussi de se décentrer de ce qui se passe autour. On est comme dans une chambre noire, collé à ce qui se passe dans le viseur, on n’a rien qui nous embête à côté et on a vraiment la photo telle qu’on la verrait sur son écran d’ordinateur, de manière très centrée.
On peut changer d’objectif ; par contre, ça demande un vrai apprentissage de prise en main. Ça ne sert à rien d’avoir un appareil de ce type si on le laisse sur le mode tout automatique – et là, Laurent en parlerait bien mieux que moi, car c’est l’objet de sa formation : abandonner le mode tout auto pour exploiter le mieux possible son reflex.
Il est rapide et réactif. On verra après qu’il faut choisir un appareil reflex rapide et réactif pour la photographie animalière.

Évidemment, comme on peut changer d’objectif, ça nécessite ensuite l’achat d’autres optiques. Il ne faut pas se contenter, si on achète un reflex, du kit de base, qui est souvent un 18-55mm. On ne peut pas s’en contenter ; déjà, la qualité optique est souvent assez moyenne, et concernant le grossissement, ce n’est vraiment pas suffisant.
Je vous dirai, après, ce que l’on peut acheter quand on commence la photo animalière.

Y a-t-il un reflex idéal ? Je ne vais pas parler de marques (elles sont toutes bonnes), mais oui, il y a un reflex idéal par rapport aux caractéristiques de ce reflex-là.
– il faut qu’il ait un viseur lumineux, ce qui est valable pour toutes les pratiques de la photographie, mais peut-être encore plus pour l’animalier, parce que souvent on photographie les animaux en début de journée ou en fin de journée, quand ils sont actifs. Donc les conditions de lumière sont souvent assez pauvres, assez limites, et c’est bien d’avoir un viseur lumineux à 100%
une rafale rapide. Ça peut être un plus pour le comportement de l’animal. Les meilleurs sont dans les 8 images/seconde. Ça peut être un critère d’achat. Si on veut figer un mouvement d’animal dans un bon comportement, prendre une bonne rafale, en deux trois secondes on va avoir une vingtaine d’images, et sur ces images on aura forcément une attitude sympathique.
un autofocus réactif. Très important, toujours par rapport à l’animal en mouvement. Ici un passereau. Les passereaux sont réputés être très vifs, ils bougent beaucoup, d’avoir un autofucus réactif et qui suit le sujet, c’est vraiment un plus. L’autofocus est lié au reflex de par sa technologie propre, mais il est aussi lié à la lumière qui rentre et à l’objectif qui peut être lumineux ou pas. Plus il est lumineux, plus l’autofocus sera réactif.
tropicalisé : ça veut dire qu’il ne craigne pas trop les embruns, la pluie, la poussière. Ce n’est peut-être pas le critère d’achat qui sera prégnant au début, mais pour certains photographes, ça peut être important.
une bonne mesure de la lumière : mais c’est finalement ce qu’on demande, a priori, à tout reflex.
Évidemment, pour un reflex qui aurait tout ça, on va plutôt taper dans le mode expert, pas forcément pro, mais déjà expert.

Quelles optiques en fonction des contraintes de la photographie animalière ?

La contrainte est simple : on veut photographier l’animal de manière à ce qu’il prenne une place importante dans la photographie. Ceci étant, il y a de très belles photographies dans lesquelles il n’a qu’une toute petite place. Pour ça, il faut une grande focale.
– Avoir de la proximité, d’où une grande focale.

– Avoir de la vitesse d’obturation.

– Une grande ouverture. Je vous l’ai dit, on photographie souvent dans des conditions lumineuses assez moyennes. Il faut avoir un diaphragme avec une ouverture assez importante. Par exemple un 70-300 mm qui ouvre à 5.6 à 300 mm, c’est souvent insuffisant. J’ai expérimenté ça pendant de nombreuses années, en forêt ou en fin de journée, on est vite embêté, on est obligé de monter dans les ISO assez rapidement parce qu’il n’ouvre que jusqu’à 5.6. Donc avec une ouverture plus importante, on peut avoir une plus grande vitesse d’obturation et ne pas avoir de flou de bouger.

– Une mise au point rapide et silencieuse, c’est super important surtout pour les mammifères et également pour les oiseaux qui ont une très bonne ouïe. Un objectif qui fait une mise au point – toutes les marques ont leur sigle propre, chez Pentax je crois que c’est SDM, chez Canon HSM, etc. – rapide et silencieuse est un vrai plus.

– Et puis, stabilisé. Pour Canon et Nikon, c’est mieux s’il l’est ; c’est aussi plus cher. Les marques comme Sony et Pentax ont, sur leurs reflex, déjà la stabilisation intégrée, ce n’est donc pas nécessaire d’avoir l’objectif stabilisé. Ce n’est peut-être pas le point le plus important, la stabilisation. Parce que c’est déjà beaucoup plus cher, ça use aussi un peu de batterie, mais l’avantage de l’objectif stabilisé sur l’objectif, c’est qu’on va avoir, dans la visée, la stabilisation effective.

L’objectif idéal ? C’est assez subjectif, d’autres ne seraient pas d’accord, on peut en discuter. Le 300 mm f/4. C’est une focale fixe. Alors c’est vrai qu’on n’a pas de latitude, en affût, si l’animal est trop proche, avec un 300 mm, c’est assez rare, mais s’il est trop proche, on ne pourra pas dézoomer pour l’avoir dans le cadre – c’est rare avec le 300 mm, mais ça peut arriver avec le 500 mm.
300 mm f/4, c’est déjà une bonne ouverture. Par rapport à 5.6, c’est bien plus lumineux. Il existe un 300 mm qui ouvre à 2.8, qui est plus lourd, plus gros, donc plus contraignant – déjà, ça, ça pèse – et surtout beaucoup plus cher. Celui-ci est dans les 1 000 euros, environ, c’est un Pentax, un peu plus cher pour le Canon et le Nikon. C’est vraiment un super objectif. J’en discutais avec Fabien Grébant. Lui a un 500 mm, parce que c’est son métier et qu’il est amené à avoir des photographies plus proches de l’animal, aussi, mais il me dit que s’il devait garder un seul objectif, ce serait celui-ci. Parce que c’est vraiment le couteau suisse. En plus, il a une distance minimale de mise au point assez proche, donc on peut faire aussi de la proxiphoto, pourquoi pas, un peu de macro de manière ponctuelle ; et comme c’est une focale fixe, une qualité optique, un piqué vraiment super.

Donc, ce serait ça. Évidemment, c’est un investissement, mais pour un super objectif. La mise au point rapide et silencieuse est vraiment un plus. Je l’ai emmené ici pour vous le montrer, ce n’est pas très volumineux – plus qu’un grand-angle, bien sûr -, mais on peut faire de la billebaude avec, on ne sera pas trop fatigué. Un 300 à f/2.8, c’est déjà beaucoup plus lourd, on peut vite avoir des crampes et être moins stable aussi.
J’en ai terminé pour la partie présentation, maintenant, je veux bien répondre à toutes vos questions.

… : Mettre en place un 300 sur un APS-C…

Régis : C’est ça, exactement. C’est un 420 mm. C’est vrai que je n’en ai pas parlé, mais c’est un APS-C. Un petit capteur par rapport à un plein format, donc on applique le coefficient multiplicateur de 1,5 (un peu plus pour Canon, je crois, qui est 1,6), et effectivement, ça devient un 420mm, c’est super. Après, si on passe à un plein format, on perd ce bénéfice-là, mais là, je suis à 420mm qui ouvre à f/4, c’est vraiment un super compromis pour commencer.

… :

Régis : Oui, évidemment, à main levée, la fameuse règle du 1/longueur focale, si c’est un 400 mm je dois être au… 500e, c’est vraiment l’assurance tous risques. Comme il est stabilisé, je peux descendre un petit peu. Bien calé, je peux encore descendre un peu, mais oui, à main levée, c’est jouable. On peut avoir des vitesses vers les 1/500e. Dans de bonnes conditions lumineuses, on peut l’avoir, oui.

… :

Régis : Par rapport au prix ? En focale fixe, il n’y aura pas moins. Après, 200mm, c’est un peu juste. Même si c’est APS-C et qu’on applique le coefficient multiplicateur, ce sera quand même un peu juste. Il y a le 70-300mm, assez connu, qui est fait par Sigma. J’ai commencé avec ça, il est très bien, mais il ouvre à f/5.6 et parfois c’est un peu frustrant, car on est obligé de monter un peu en sensibilité. La qualité optique est quand même moins bonne, parce que c’est moins cher, parce que c’est un zoom, forcément il y a des contraintes à faire, mais ça peut être un bon compromis pour commencer. Et puis, les images sont quand même bonnes, attention ! Quand je dis que la qualité optique est moins bonne, oui, elle l’est, mais ça ne fait pas des images pas chouettes; ça fait de belles images quand même.

… :

Régis : C’est vrai que, comme tu le dis, pour les jardins ils ne sont pas très farouches. Mésanges, rouges-gorges ; si on a une mangeoire, on se place dans son affût, ça peut être une tente, de son balcon ou même de sa fenêtre et c’est vrai qu’un 200mm peut largement suffire. Les oiseaux peuvent être à deux ou trois mètres. Quand ils sont habitués et surtout quand ils ont à manger, ils peuvent venir assez près. Et le 200mm peut être largement suffisant.
Et après, on peut taper bien au-delà, évidemment.

Laurent : Pour développer un peu sur la question de l’objectif, effectivement, je pense qu’avoir un capteur APS-C en photo animalière c’est plutôt un avantage, pour le coup, parce que, souvent, le full frame c’est moins de profondeur de champ, ça monte peu dans les ISO, etc. Sauf que là, on a une focale multipliée par 1,5 pour, je vais dire, zéro euro, voire généralement moins cher qu’un full frame. Donc, on peut acheter un objectif moins cher et avoir plus de focale, et je pense que pour la photo animalière, c’est plutôt un avantage. Pour pas mal de photos où on a besoin de voir assez loin, comme pour la photo de sport, avoir un boîtier APS-C, c’est la même chose. Ce n’est pas le cas pour la plupart d’entre vous, mais si vous voulez vous spécialiser dans la photo animalière et que vous pensez acheter un full frame, ce n’est peut-être pas la meilleure option. Il vaut mieux économiser pour un 300mm, je pense.

… : Comment faites-vous pour protéger le matériel en cas de pluie, quand vous êtes sur le terrain ?

Régis : Si vraiment il pleut très fort, je ne suis pas sur le terrain, parce que les animaux ne sont pas fous, ils n’y seront pas non plus. Sinon, je suis dans mon affût, auquel cas je rentre le matériel si je dois le rentrer. Il y a une technique, mais qui demande plus de mise en œuvre, on peut faire un double affût. Avoir une tente d’affût achetée dans le commerce (il y en a des chères, d’autres moins. Ça peut être 70, 100 euros, 150 pour certaines marques) et par dessus mettre une toile pour protéger un peu l’objectif qui va sortir. Mais vous savez, cet objectif n’est pas très long, il ne sort pas beaucoup de l’affût. Ensuite, l’objectif n’est pas tropicalisé, mon appareil l’est, mais en cas de petite pluie fine qui dure peu, ça va le faire. En plus avec la protection devant, les gouttes d’eau ne vont pas aller dessus. Et s’il pleut fort, je le rentre et voilà. En cas de gros orage, je ne suis pas en train de prendre des photos. Mais c’est intéressant, en cas d’orage d’été, notamment, de sortir juste après l’orage. Parce que la lumière est superbe, il y a des gouttes d’eau partout, une ambiance particulière, un air chargé d’humidité et on peut faire des photos magnifiques avec une ambiance très spécifique à ce temps d’après orage. Mais sur le moment de pluies très fortes, je ne suis pas dehors. Je n’y vais pas.
Par rapport aux protections, ce qui est difficile pour les appareils, ce sont les embruns, la mer, le sel, le sable, la poussière. Ce qui est vraiment embêtant, c’est la poussière. Ça grippe. Les petits grains qui vont se mettre dans les sélecteurs, dans les molettes, ils n’aiment pas bien. Après, dans les safaris (je n’en ai pas fait), prendre des précautions draconiennes avant et après, dépoussiérer avec une soufflette, mettre dans des sacs. Mais pour la pluie… ne pas sortir l’appareil en cas de forte pluie.

… :

Régis : J’avoue ne pas être passionné par le matériel et toutes les sorties actuelles. Tu parles des hybrides ? Je pense que Laurent sera plus à même de répondre à ça. Par rapport au Sony Nex-7 ?

… :

Laurent : On me pose la question par rapport au Sony Nex-7 qui est un appareil plus léger qu’un Pentax : est-ce que c’est valable de l’emmener lors d’un voyage ? Clairement, plus c’est léger pendant un voyage, mieux c’est. De plus, les Nex sont des grands capteurs, donc la qualité d’image n’est pas moins bonne que sur un reflex, voire meilleure que certains reflex, d’ailleurs, donc aucun souci à emporter un Nex-7. Là, pour de la photo animalière en voyage, il va falloir une longue focale qui doit être adaptable au Nex, mais ça existe chez Sony. Si vous allez sur leur stand, il pourront vous conseiller sur des 300mm chez eux.

Régis : Si le voyage est un voyage touristique et que, éventuellement, pendant le séjour tu vas peut-être pouvoir faire de la photo animalière, ce n’est pas la peine d’amener tout ton matériel. Par contre, si tu fais un voyage photo prévu pour ça, là, tu amènes tout ce que tu as. Quitte, ensuite, sur les jours de sortie, à ne prendre qu’une partie de ton matériel, mais il faut tout emmener, au cas où. Ça fait du volume, c’est sûr, mais si tu fais un voyage de photo pour la photo, avec un guide, notamment (il y a des agences qui font ça), il faut tout emmener, quitte à choisir en sélectionnant au fur et à mesure. Mais ne pas partir qu’avec un Nex-7, par exemple, parce que pour la photo animalière, ce ne sera pas suffisant.

Laurent : Y a-t-il encore des questions ? Vous voyez, Régis ne mord pas, alors n’hésitez pas.

… : Par rapport à votre formation, la prochaine sera pour quand ? Est-ce que vous avez une date ? Parce que le délai est très court pour s’inscrire.

Régis : Oui, c’est une semaine. Ce sera fin mars, début avril.

Laurent : Je suis sûr qu’il y a encore des questions.
Monsieur demande si les doubleurs de focale ou les multiplicateurs à 1,4 sont une bonne idée.

Régis : Oui, c’est une bonne idée. Il y a toujours un débat sur le fait d’avoir un doubleur de focale. C’est-à-dire que, évidemment qu’on va doubler la focale, mais il y a beaucoup de contraintes. Je pense qu’il y a plus de mauvais côtés que de bons côtés. Le bon côté, c’est qu’on va doubler sa focale, ou même la multiplier par 1,4, ce qui est bien par rapport à l’approche de l’animal, mais par contre, on va diminuer son ouverture, donc on aura un objectif moins lumineux. L’autofocus sera peut-être moins réactif. Et certains disent que de rajouter un intermédiaire optique entre l’objectif et l’appareil, ça peut aussi diminuer le piqué. Je ne suis pas forcément un partisan du doubleur de focale ; je pense que si on veut se rapprocher de l’animal, il est préférable de mieux le connaître, prendre les dispositions pour être plus proche de lui, c’est-à-dire mieux camouflé, mieux connaître ses habitudes de vie, être là quand lui n’est pas encore là, et quand il sort (je parle du lapin de garenne, par exemple) on est plus proche et déjà placé avant sa sortie. Et puis l’habitude. Être sur le terrain tout le temps, tout le temps ; je ne dis pas que les animaux s’habituent à notre présence, mais en tout cas, ils savent que dans l’environnement, il y a quelque chose qui ressemble à un photographe. Ils sont habitués à ça. C’est plus long à mettre en œuvre qu’un doubleur de focale, mais les résultats seront meilleurs, de toute façon. Je ne suis donc pas forcément partisan de ce matériel optique là, car les contraintes sont plus importantes que les avantages, je pense.

… :

Régis : On peut louer, oui. Il y a Objectif Location chez qui j’ai loué plusieurs fois des objectifs. C’est un super site. Il y a le choix entre Canon, Nikon, Sony et Pentax. Ils n’ont pas de 500mm, parce que le coût est trop élevé, pas à l’achat pour eux, mais par rapport aux assurances de location, mais des 300mm f/4, oui ; si vous ne savez pas trop ce que c’est comme objectif, louez-en un pendant une semaine, ça coûte aux alentours de 70 euros. Ça vaut le coup d’essayer comme ça avant d’acheter et de regretter peut-être par la suite.

Laurent : Pour revenir sur les doubleurs de focale, je pense qu’une des situations dans lesquelles ça peut se justifier, c’est si tu as déjà une focale fixe avec une assez grande ouverture, genre 300mm f/2.8, et dans ton sac tu as un multiplicateur 1,4 ; ce n’est pas très lourd, et tu peux avoir besoin un jour d’avoir un 420 quelque chose qui sera f/4, donc ça reste correct, et ça permet de ne pas devoir investir dans un 500, parce que tout de suite c’est 5 kilos en plus dans le sac et 5 000 euros en moins sur ton compte en banque. Disons que, si tu as déjà du matériel de photo animalière qui est bien et à grande ouverture, un multiplicateur peut être un complément ; par exemple, tu vas dans un parc, il y a déjà un affût pour les oiseaux et tu en as un un peu loin, tu peux démonter tranquillement ton matériel pour mettre le multiplicateur, ça peut être bien. Mais c’est vrai que, pour moi, ça reste un complément.

Régis : C’est vrai que dans les magazines photo, dans les Exifs, on voit souvent, en bas de la photo, des pros qui utilisent un multiplicateur de focale. Ils l’utilisent également, parfois malgré leur 500mm. Bon, ils ont déjà un 500mm qui ouvre à f/4, donc c’est une bonne ouverture et ils peuvent se permettre de faire ça. Mais franchement, Laurent l’a très bien dit, c’est un complément, un accessoire qui peut être utile parfois, mais il vaut mieux – et c’est plus efficace – se rapprocher de l’animal physiquement, dans les règles de l’art, et avoir la connaissance de l’animal, évidemment.

Laurent : on va prendre une dernière question.

… :

Régis : C’est une bonne question. Les longues-vues, ce que l’on appelle la digiscopie ? Pour l’animalier… Ça peut faire de très jolies photos. Il y a eu des comparatifs faits entre un 500mm et une longue-vue : les photos sont très bonnes également, par contre, il y a un point rédhibitoire, c’est par rapport à l’autofocus, la réactivité de l’appareil, du complexe, c’est très mauvais. Je ne parle que de la réactivité. Ne comptez pas faire de photo animalière de comportement, de prise en rafales avec ce type de montage. Mais si c’est de l’observation, que vous voulez avoir des souvenirs de très bonne qualité d’observation d’animaux – particulièrement des oiseaux -, ça peut être très sympathique. Mais pour l’animalier tel que j’en ai parlé ici aujourd’hui, ce n’est pas la bonne solution. Ne serait-ce que par rapport à l’autofocus et à la réactivité de l’appareil. Et pour suivre le sujet en mouvement, c’est quasiment impossible.

… :

Régis : Par rapport au suivi ? Ça dépend : s’il est en mouvement, vous mettez – en fonction des marques, chacune a sa désignation particulière – en continu. S’il n’est pas en mouvement, vous ne mettez pas en continu. Ça dépend du contexte.

Laurent : Merci à tous pour votre présence. Je pense qu’on peut applaudir Régis.
 

 

 

Laurent Breillat
J'ai créé Apprendre.Photo en 2010 pour aider les débutants en photo, en créant ce que je n'avais pas trouvé : des articles, vidéos et formations pédagogiques, qui se concentrent sur l'essentiel, battent en brêche les idées reçues, tout ça avec humour et personnalité. Depuis, j'ai formé plus de 14 000 photographes avec mes formations disponibles sur Formations.Photo, sorti deux livres aux éditions Eyrolles, et édité en français des masterclass avec les plus grands photographes du monde comme Steve McCurry.
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