Après toutes les vidéos exceptionnelles de ces dernières semaines, il est temps de reprendre le rythme normal des publications, et notamment de vous livrer la suite des enregistrements des conférences sur le stand au Salon de la Photo. Voici donc celle par Eric Baledent, sur la photo de sport.
Si vous souhaitez aller plus loin, Eric a notamment écrit un livre sur le sujet publié chez Eyrolles : Photographier tous les sports, guide pratique.
Cliquez ici pour afficher/masquer la transcription complète
Bonjour à tous, bienvenue sur le stand d’Apprendre la Photo. Merci d’être venus si nombreux pour écouter Éric Baledent qui va nous parler de photographie de sport, et auquel je laisse la parole.
Bonjour mesdames et messieurs, je suis Éric Baledent, je suis photographe professionnel depuis une bonne dizaine d’années maintenant, et je me suis spécialisé dans la photographie de sport.
Je vais organiser ma présentation en deux parties : la première partie sera vraiment la présentation de la photographie de sport. On abordera plusieurs thèmes, et dans la deuxième demi-heure, voire un peu moins, nous aurons une séance de questions/réponses. Et si, éventuellement, nous n’avons pas assez de temps pour continuer cette séance, nous pourrons aller sur le stand d’Eyrolles où nous pourrons continuer nos échanges.
Dans la première demi-heure, nous allons voir une petite introduction : comment on devient photographe de sport et aussi comment on photographie le sport.
Pour devenir photographe de sport, il y a trois voies possibles :
la formation diplômante, la voie royale;
par la VAE;
ou alors le photographe de sport amateur qui souhaite devenir professionnel.
Il faut avoir des compétences, comme dans n’importe quel domaine : des compétences en matière de lumière, d’équipement et aussi de savoir-être, de comportement.
Pour accéder au métier de photographe de sport, il y a la voie royale, c’est une formation diplômante. Les deux principales sont les Gobelins et Louis Lumière. Ce sont des CAP ou BAC photo, il y a plusieurs écoles qui vous proposent ça.
Les Gobelins et Louis Lumière forment à partir du BAC et licence et master. Éventuellement, si vous n’avez pas le BAC, vous pouvez passer par des écoles de CAP ou de BEP professionnels, il n’y a aucun problème. Après, ça dépendra des objectifs que vous voudrez atteindre.
Ensuite, il y a la VAE. La VAE, c’est comme pour n’importe quel métier actuellement, c’est la validation des acquis professionnels. Vous passez devant un jury, vous exposez tout ce que vous avez fait jusque-là et au fur et à mesure, on va peut-être vous proposer un complément de formation, et ensuite vous aurez un diplôme de photographe.
Après, il y a le photographe amateur. Là, c’est une voie un peu plus longue, peut-être. Vous êtes amateur depuis dix ou quinze ans, peut-être, vous souhaitez passer photographe professionnel, donc au fur et à mesure vous deviendrez photographe professionnel encarté.
Pour être photographe de sport, il faut être embauché et travailler soit dans une maison d’édition (type Eyrolles) ou auprès de la presse quotidienne, hebdomadaire. Là, vous aurez une carte de presse (car vous aurez une feuille de salaire) marquée « journaliste », car photographe est un sous-ensemble de journaliste, et ainsi accéder à tous les stades de France ou internationaux.
Pour la VAE et le photographe amateur, c’est exactement la même chose, au fur et à mesure, vous pourrez être embauché dans des journaux, et ensuite avoir la carte de presse et deviendrez ainsi photographe professionnel.
Les compétences : je vais peut-être enfoncer certaines portes ouvertes.
Il faut, bien entendu, maîtriser la lumière en extérieur et en intérieur ;
maîtriser l’outil informatique : le post-traitement et autres ;
il faut connaître les limites de son équipement ;
il faut avoir des compétences en comportement : savoir-être et respecter les consignes.
Je vais maintenant revenir sur chaque point.
Maîtriser la lumière en extérieur et en intérieur : lorsque vous êtes photographe de sport, on va dire que ce sera plus facile pour vous en extérieur, même avec un équipement standard ; en intérieur (on en parlait tout à l’heure avec d’autres personnes), c’est un peu plus difficile. Même nous, nous sommes confrontés à des salles assez faiblement éclairées, avec des éclairages difficiles en LED, en tungstène ou autres et il faut savoir maîtriser ces lumières, faire une bonne balance des blancs.
Maîtriser l’outil informatique : le post-traitement, les fichiers. Avant, un photographe, qu’est-ce qu’il faisait ? Il était en négatif, il donnait ses pellicules à quelqu’un (je parle du professionnel) à la fin d’une période de rugby ou de football et quelqu’un développait pour lui. Maintenant, un photographe de sport doit connaître l’informatique de A à Z. Il doit pouvoir copier des fichiers, traiter des fichiers, il doit pouvoir aussi transférer des fichiers par FTP. Il faut savoir ce que veut dire FTP et toutes ces informations-là sont importantes à connaître.
Ensuite, il faut connaître les limites de son équipement, surtout en intérieur. Par exemple, si vous avez envie de faire du basket ou du volley dans des salles faiblement éclairées, vous avez un ancien reflex (ou même un reflex assez récent), vous devez savoir jusqu’où vous pouvez monter en ISO, si vous avez un objectif qui ouvre à 4.5-6.3 vous ne pourrez peut-être pas monter autant en ISO que vous le voudrez, donc il faut savoir le type d’images que vous pourrez obtenir grâce à votre matériel, c’est ça que je veux dire par « connaître les limites de son équipement ».
En extérieur, quand vous êtes à 15 heures pour du football ou du rugby, c’est un peu plus facile, bien entendu, surtout en été où, là, vous n’avez pas de difficultés pour rester sur des ISO assez bas (100/200 ISO) et monter en vitesse.
Ce qui est aussi important, ce sont les compétences comportementales, savoir-être et respecter les consignes. Savoir être, c’est savoir se présenter à un club, savoir comment se comporter vis-à-vis des spectateurs qui seront autour de vous et ainsi de suite… On m’a posé des questions dans les conférences précédentes, comment peut-on photographier dans un club de football en district ou en ligue ? C’est très simple. D’abord, vous vous adressez à quelqu’un du club, le président, généralement. Si vous ne savez pas qui c’est, la première fois, lorsque vous allez au guichet, vous demandez qui est le président du club. S’il n’y a pas de guichet (parce que maintenant, on paye de moins en moins pour accéder au terrain), vous allez à la buvette ou si vous rencontrez quelqu’un qui a la tenue du club, vous lui posez la question. C’est la première chose, c’est le savoir-être. Ensuite, vous vous présentez aux arbitres, aux délégués (s’il y en a un), parce que c’est lui ou les deux qui vont vous autoriser à aller au bord du terrain. Sans leur accord, on vous demandera d’accéder de l’autre côté de la rambarde. Ça ne fera pas grande différence, mais vous aurez moins de possibilités, sur certains terrains, de faire de bonnes photos, parce que vous aurez peut-être besoin de vous rapprocher.
Le comportement, c’est pareil : respecter les consignes. L’arbitre ou le délégué du match vous dira de vous mettre à tel endroit et de ne pas bouger, ou de porter une chasuble. Tout ça concourt à votre comportement, à ce que vous vous fassiez accepter. C’est important aussi pour vous faire accepter au bord du terrain.
On verra tout à l’heure deux exemples de terrain et je vous expliquerai comment vous placer par rapport aux autres photographes pour que vous ne soyez pas gêné et comment aussi leur dire gentiment comment se placer.
L’équipement : pour un photographe de sport, s’il est jeune, ou pour certains d’entre vous, vous avez besoin d’un équipement minimum : un boîtier et deux objectifs. Pour la plupart des sports, ça suffit largement.
Faut-il un équipement pléthorique ou non ? Un photographe amateur, généralement, va s’intéresser à un sport ou à son club, donc il n’aura pas besoin d’avoir quatre ou cinq boîtiers, une dizaine d’objectifs différents pour couvrir tous les sports. Ça, c’est illusoire pour vous. Après, vous faites, bien entendu, en fonction du sport. Pour le football, vous aurez peut-être besoin de prendre des actions proches de vous, donc ce sera un 24/70 ou un 170/200. Ou, éventuellement, à l’opposé du terrain (au rugby, ça va tellement vite quand il y a une interception, vous ne pourrez pas courir en même temps que les joueurs sur le terrain, ou même à côté), donc vous aurez besoin d’un téléobjectif, un 300 ou un 400.
Après, bien sûr, ça dépend si c’est en intérieur ou en extérieur. En intérieur, objectif lumineux. Un exemple d’un certain gymnase du nord des Yvelines, en lumière tungstène et je suis souvent en 12 008, f2/8 et 1/60e de seconde. C’est très difficile. Je suis obligé de rester parce que je dois ramener des images pour la presse quotidienne, mais je sais que si je ne devais pas ramener de clichés, je n’irais jamais dans ces stades-là. Hier, à Thorez, j’ai fait la pro 1 entre Nanterre et Pau, c’était un relativement bon éclairage, j’étais à 4000 ISO, f/4 et 1 millième de seconde. Vous voyez, vous allez devoir gérer aussi tout ça en tant qu’amateur, ces conditions lumineuses en intérieur. Donc, si possible (je sais que ça vaut très cher), un 50 mm 1.4, je vous le conseillerai. Ça vaut très cher dans certaines marques. Prenez Sigma, c’est un peu moins cher. SI vous prenez avec le HSM, la motorisation, il n’y a plus les problèmes d’engrenage ou autres, donc aucun problème, c’est très fiable.
Ensuite, les sports. Je fais une dichotomie entre photographe professionnel et photographe amateur. Pas au niveau qualité, pas au niveau compétences, pour moi, on est tous au même niveau. Comme dans n’importe quel métier, il y a toujours des personnes qui sont bonnes dans leur métier et d’autres qui ne le sont pas. Même s’ils essayent de le faire, malheureusement ils n’ont pas d’appétence pour le faire. Par contre, un photographe amateur, généralement, ne fera qu’un seul sport ou qu’un seul club, comme je vous l’ai déjà dit. Il sera donc plus à fond dans le club, il connaîtra à fond tous les acteurs et le reste. Nous, photographes professionnels, nous sommes obligés de faire tous les sports. On peut faire dans la même journée, du foot, du rugby, du volley, du tennis, de la gymnastique. On peut tout faire, donc on doit être polyvalents.
Et l’équipement, je répète : le photographe amateur peut être limité financièrement pour s’équiper. Un 400 mm 2.8, chez Canon ça vaut 10 000 euros. Un 300 mm 2.8 chez Sigma, ça vaut 3 000 euros (vous voyez la différence). C’est ça qui va vous limiter.
Il y a deux types de photographes professionnels : les free-lances ou les agenciers.
Les free-lance sont des personnes comme moi. On se vend à la presse quotidienne. On est un peu moins libres financièrement pour pouvoir s’acheter du matériel. Dans mon sac, j’ai trois boîtiers, deux sur moi et un troisième pour le football, le rugby ou le handball que je mets derrière les buts (c’est un vieux reflex) et j’ai quatre à cinq objectifs, c’est tout. Sans compter les accessoires, les ordinateurs, les flashs…
Les agenciers, ceux qui sont embauchés à l’AFP, Getty, l’Équipe, etc., n’ont aucun problème pour s’équiper. Je vous donne un exemple : en 2008, lors du Tour de France à Londres, Getty a vu son monospace avec tous ses équipements brûler. Ils ont téléphoné, ont commandé une nouvelle voiture et de nouveaux équipements. Ces photographes-là, par rapport à nous, ont moins de difficultés à s’équiper. On les envoie sur les Jeux olympiques, on leur donnera cinq boîtiers, une quinzaine d’objectifs pour faire toute sorte de sport.
Il y a déjà, entre nous, une séparation à ce niveau-là.
Ensuite, on va rentrer au fur et à mesure dans le vif du sujet. Effectuer un reportage, ça se fait en trois temps :
On prépare son reportage ;
on réalise son reportage ;
on fait son reportage.
Préparer son reportage, ça se fait six mois avant ou la veille. C’est tout simple, comme n’importe quel photographe, vous préparez votre matériel, vous regardez s’il est sale ou propre, si vous avez besoin de recharger vos batteries, besoin de préparer vos fichiers de métadonnées (j’expliquerai tout à l’heure ce qu’on met dans les fichiers de métadonnées). Éventuellement s’il faut faire une demande d’accréditation. SI vous connaissez le club, vous savez que vous pouvez y aller, mais si vous allez dans un nouveau club, peut-être faut-il envoyer un message avant. Quand on va chez quelqu’un qu’on ne connaît pas, généralement on toque à la porte ou on téléphone avant.
J’avais dit six mois avant, on peut préparer un reportage un an avant. On prépare un reportage un an avant dans la photographie professionnelle, c’est-à-dire quand on va aux Jeux olympiques ou à la coupe du Monde féminine au Canada l’année prochaine, je prépare déjà mon reportage. Enfin, pas le reportage spécifique, mais préparer l’environnement : regarder les hôtels, les avions, etc. pour essayer de tirer les prix. On sait qu’une agence qui va à l’étranger ne rentre jamais dans ses frais. Quoi qu’il arrive, ça nous revient environ à six ou dix mille euros par personne ; on ne vendra jamais six à dix mille euros une image spécifique pour ce genre d’évènement.
Ensuite, on réalise son reportage, quand on est prêt, c’est le jour du match. Comme je vous l’ai dit tout à l’heure, si vous avez besoin d’accéder au terrain, vous allez vous présenter et on va vous dire où vous placer. On récupère nos accréditations, on entre sur le terrain. Essayez de récupérer la feuille de match, c’est important. Vous ne connaissez peut-être pas tous les acteurs et ça va vous permettre de mettre un nom sur chaque acteur au niveau des métadonnées. C’est important aussi. Quand vous pouvez récupérer la feuille de match… Parce que, on sait bien que… dans les Yvelines, on descend jusqu’à la septième division de district et à ce niveau-là ils n’ont pas de photocopieuse. Au niveau ligue, ce sera plus facile, vous aurez sûrement quelqu’un qui pourra vous faire une copie de la feuille de match. Sinon, vous prenez votre appareil photo ou votre téléphone et vous faites une copie.
Ensuite, on fait les photos, bien entendu. On est là pour ça… Vous allez faire des photos (on en parlera tout à l’heure), savoir quel type de photos vous devrez faire et ensuite, vous devrez les traiter. Ça, c’est la troisième partie. On traite son reportage tout de suite après. On envoie, nous les photographes professionnels, une trentaine d’images le jour de l’évènement – une quinzaine ou une vingtaine en première période et autant en deuxième période – des faits marquants de l’évènement. Une expulsion, un but, une photo de joie, l’entraîneur qui se fait remonter les bretelles par l’arbitre (on verra une photo d’exemple tout à l’heure). Et le lendemain ou le surlendemain, on envoie des photos de stock : c’est chaque joueur pris individuellement d’une manière, si possible, anonyme au niveau de l’environnement (c’est-à-dire ne pas voir à l’arrière les panneaux publicitaires ou les spectateurs) pour qu’on puisse les réutiliser pour n’importe quel article. C’est ce que l’on appelle stock. Un exemple, pour un match de football ou de rugby, un match avec opposition, on fait environ mille à mille deux cents photos et, sur ces photos, on en envoie trente le jour même, et le lendemain ou surlendemain, on en envoie cent cinquante à deux cents. Le reste c’est pour la poubelle.
Pour réaliser un reportage, il y a des choses à connaître, pour les sports que vous allez choisir. Il faut connaître :
les règles ;
le terrain ;
les acteurs ;
et son histoire.
Il faut aussi avoir des automatismes. (on va reprendre tout ceci)
Les règles : il est important de connaître les règles du ou des sports que vous allez photographier. Par exemple, au polo, il faut savoir que les chevaux doivent jouer en ligne. Dès qu’un cheval sort de sa ligne, il y a une faute. Ça, il faut le savoir.
Ça vous permettra de savoir où vous placer par rapport aux buts d’un terrain de polo. Ça va vous permettre aussi d’anticiper la façon de jouer. Parce que, moi je suis un ancien arbitre de football, je sais, grosso modo, comment un joueur va réagir après une décision arbitrale. Si l’arbitre s’est trompé, le joueur va certainement montrer son désappointement. Pareil, l’entraîneur va montrer son désappointement ou sa joie, donc il faut connaître les règles, c’est à ça que ça sert.
Le terrain : connaître ses dimensions, savoir où se placer va vous aider. On verra tout à l’heure un exemple sur un terrain de football.
Les acteurs : joueurs, entraîneurs, arbitres, présidents, etc. Quand on est photographe professionnel de sport, on a intérêt à connaître la plupart des joueurs de notre sport. De toute la ligue 1, par exemple puisque je parle de football, ou de la Pro A pour le basket. Ça fait beaucoup de personnes à connaître. Pourquoi ? Parce que, dans les tribunes, on sait qu’il y a une tribune officielle, VIP, mais les présidents ne sont pas forcément au bon endroit, pas en plein milieu, ils peuvent être décalés et il faut savoir où photographier. Pareil lorsqu’il y a des VIP dans la tribune du Parc des Princes, il faut savoir qui vient.
L’histoire du club : c’est simple, si un jour vous rencontrez Juste Fontaine, qui a marqué 13 buts, sur le bord du terrain, il faut savoir que c’est Juste Fontaine. Il a sûrement vieilli depuis les années 58, donc il vaut mieux le connaître, toujours s’intéresser à son sport. Ça sert à ça de connaître son histoire. C’est peut-être enfoncer une porte ouverte, mais c’est important à savoir. Parce que ça vous permettra, peut-être, de vous différencier d’un autre photographe. Et si, un jour, vous voulez devenir photographe de sport, vous serez capables de rendre ces images-là et de montrer que vous êtes capables de les obtenir.
Avoir des automatismes : cela vaut surtout pour les photographes professionnels. Qu’est-ce que j’entends par « automatismes » ? Ça rejoint l’automatisme du reflex, savoir si on shoote en priorité à l’ouverture ou priorité à la vitesse, est-ce qu’on est en ISO à 12 008 ou à 4000 ? En fait, ça vaut surtout pour les photographes professionnels, car comme je vous le disais, dans la même journée on peut faire six sports différents – à 15 heures du football, à 17 heures du football avec des projos, à 20 heures du basket en intérieur et on peut changer à 21 heures pour du handball dans une autre salle très mal éclairée et finir par de la boxe à 23 heures. Ce sont tous des éclairages différents, avec des luminosités différentes, des conditions différentes à chaque fois. Donc, quand on change d’environnement, il ne faut pas qu’on se pose de questions. On va se dire c’est du foot à 15 heures, ensoleillé, on va dire 100 ISO, f/4, on va être à 1/1500 de seconde, et on va revenir faire du sport à 18 heures, on va devoir changer les ISO, donc il faudra le faire automatiquement. On n’a pas le temps de se poser de questions. Ça sert à ça, les automatismes.
Comme je vous le disais, on va prendre deux exemples pour rentrer un peu plus dans le vif du sujet. Football (comme par hasard, arbitre de football, je prends un exemple sur le football), mais au rugby ce sera la même chose.
Ça, ce sont les dimensions d’un terrain préconisées par la Fédération internationale de football association, la FIFA. Ce qui nous intéresse, c’est cette zone-là et celle matérialisée en rouge ici. En fait, sur tous les terrains, cette ligne en rouge devrait être tracée. C’est la limite des photographes. Ils ne doivent pas la dépasser, normalement. Un indice pour les photographes professionnels : il y a de la pub, là, et on n’a pas le droit de se mettre devant la pub ; la télé n’est pas contente si on se met devant la publicité.
Il y a les zones techniques ici, et aussi des balustrades. Au fur et à mesure, je vais vous expliquer où on peut se placer. Au rugby, ce sera, grosso modo, les mêmes dimensions et les mêmes emplacements. J’ai placé des flèches rouges tout au bord du terrain, pour le football c’est là où vous aurez l’autorisation de vous placer. Généralement, c’est jusqu’aux seize mètres cinquante de chaque côté. Côté zone technique, derrière la ligne de buts, de chaque côté, et éventuellement le long de cette ligne de touche.
Zone technique : interdit de s’y mettre. Qu’on soit professionnel ou amateur, c’est la même règle pour tout le monde. Vous savez qu’il y a des personnes plus ou moins intelligentes, supportrices de leur club qui pourraient, éventuellement, ne pas être d’accord avec le club adverse et qui pourrait vouloir se venger. C’est pour ça que le délégué et l’arbitre vous interdiront de vous mettre sur la zone technique. De plus, vous avez, de chaque côté de la zone technique, une zone plus ou moins importante, c’est pour ça que je vous conseille de vous arrêter aux seize mètres cinquante du côté de la zone technique. Voilà où vous pouvez vous placer ; moi, je vous conseille de vous mettre de ce côté-là. Ici, éventuellement, mais ça dépendra de la distance que vous aurez entre la ligne de touche et la rambarde. Parce que si vous êtes proche du terrain (on va dire un mètre), sur certains terrains ce sera trop proche et vous allez certainement gêner les athlètes qui jouent au football. En plus, le juge de touche est là. Au rugby, ils jouent tout du long, ici, et vous allez gêner, quoi qu’il arrive, et le juge de touche ne sera pas content. Donc, je vous conseille de vous mettre là.
Qu’est-ce que je peux dire d’autre ? La position du joueur : je vous disais tout à l’heure qu’il faut comprendre et connaître les règles du sport que vous allez photographier, mais aussi connaître le comportement du joueur. Au football, quand on va frapper, on va ouvrir son corps du côté droit. Ce qui veut dire que vous aurez le corps de l’athlète de ce côté-là. Au basket (on verra tout à l’heure le hand et le basket), ce sera le contraire. Quand il va faire un mouvement, il va ouvrir du côté gauche. C’est aussi ça, les règles du sport. Pas seulement les règles, les dimensions, les fautes intentionnelles ou pas, c’est aussi les règles du joueur.
Pour avoir une bonne photo de sport, il faut avoir, si possible, le corps du joueur du bon côté. Donc, au football, en général, on se met de ce côté-là. Et bien entendu, du côté opposé, ici.
Pour le handball et le basket, ce sera, grosso modo, les mêmes positions. On se met toujours derrière la ligne de but. La zone technique, là, interdit. Au basket, elle fait généralement toute la longueur, donc vous ne pourrez pas vous y mettre. Sauf peut-être en cas de temps mort où vous pourrez vous déplacer pour prendre la photo de l’entraîneur qui discute avec ses joueurs. Le 5 majeur est toujours assis et l’entraîneur dos au terrain, et vous pourrez l’avoir de face. Est-ce que vous pouvez vous placer ici ? J’ai envie de dire que ça dépend de la configuration du gymnase. SI les tribunes sont assez loin, éventuellement vous pouvez vous mettre là. Mais l’action se déroule très rarement le long de ce côté-là, au handball ou au basket. Généralement, ça se joue à ce niveau-là. Ensuite, par rapport au football où je vous disais que le corps s’ouvre à droite, au handball et basket, il s’ouvre du côté gauche, donc on change de côté. Au football on se serait mis là, au handball ou au basket, on se met là.
Vous voyez la zone des trois points, là, c’est la raquette, je vous conseille de vous mettre là, pour le basket. Parce que, généralement, les joueurs jouent souvent au niveau du panier, mais la plupart des actions, ils arrivent d’un côté ou de l’autre, et ils s’arrêtent ici pour shooter. Ou alors, ils s’arrêtent ici et si vous êtes trop près pour shooter, vous seriez caché par les autres joueurs. Essayez d’ouvrir votre position.
Ensuite, on va voir des images que j’ai faites lors du dernier match de ligue 1 au parc des Princes.
ll faut prendre les images d’ambiance dans les tribunes, les différents acteurs de l’évènement et les faits de jeu.
L’ambiance dans les tribunes : en France, on est très peu grimés, il y a très peu de spectateurs qui se colorent de pied en cape. C’est plus dans la mentalité africaine ou sud-américaine. Vous pouvez prendre ces personnes-là, car elles viennent exprès pour qu’on les prenne en photos. Vous n’aurez pas de problèmes de droit à l’image. Quand vous faites des photos de tribune ou de spectateurs, essayez de prendre en plan large, parce que, justement, ça concourt au droit à l’image. Si vous prenez un groupe de personnes, vous ne vous focalisez pas sur une personne. C’est un petit conseil que je vous donne.
Les différents acteurs de l’évènement, on en a déjà parlé. Chaque joueur, chaque entraîneur, chaque président, les arbitres (il ne faut pas les oublier).
Et les faits de jeu (j’en ai déjà parlé), ce sont les expulsions, les cartons jaunes, un joueur blessé, au sol, qui se plaint. Il est touché au genou, mais il se touche la tête parce qu’il a mal au genou – les joueurs de foot sont assez mal coordonnés. Toutes ces petites choses, vous devrez les prendre en photos.
Je vous ai donné deux exemples avec deux objectifs : un 70-200mm et un 400 mm f/2.8. Savoir si on doit cropper ou pas dans une image et ce que l’on obtient directement avec un appareil. L’appareil est un 1dx.
Pour le match PSG – OM, je m’étais mis là, la zone technique est là, les joueurs rentraient là. Avec un 70-200, on peut prendre cette zone-là sans aucun problème. Bien entendu, on zoome ; on n’a pas besoin de cropper, normalement. Si vous prenez un joueur ici au 70-200, bien entendu, vous serez certainement obligé de cropper, recadrer votre image.
L’image que je vais vous faire voir, le joueur était ici, il s’adressait au juge de touche, parce que monsieur n’était pas content parce que le juge de touche n’avait pas signalé quelque chose. C’est une image brute de fonderie. J’ai un peu retravaillé, bien entendu, ça donne mal à l’écran ; c’est au 0-200, sans recadrage. Voilà le type d’images que vous pourrez avoir dans cette zone-là.
En 400 mm : pareil, à partir de cette zone-là, vous pourrez prendre des images sans aucun problème (football ou rugby).
Deux endroits : ici, on peut dire que, en 400 2.8, on peut prendre une image sans recadrer. C’est monsieur Zlatan qui va adresser une passe à Aurier sur le deuxième but du PSG.
Dans cette zone, ici, vous avez vraiment besoin de recadrer votre image. Là, c’est monsieur Blanc qui discute avec monsieur Turpin sur une faute qu’il n’aurait pas sifflée, paraît-il. Là, il y avait beaucoup de matière tout autour, j’ai dû recadrer pour avoir la focale sur les deux protagonistes.
Depuis tout à l’heure, je vous dis qu’on a besoin de traiter les images.
Que fait-on quand on traite une image ?
On redresse ;
on recadre ;
on expose ;
et on gère les métadonnées.
Les métadonnées, c’est surtout pour les photographes professionnels.
On redresse surtout les verticales. Une verticale dans une image, paraît-il que ça choque. Un horizon va être légèrement penché, en fait, on regarde sur chaque image et on remet la verticale en vertical.
On recadre, c’est la deuxième chose qu’on fait. On croppe s’il y a beaucoup de matière autour.
On expose. On gère l’exposition, parce que, normalement, quand on est photographe de sport, est-ce qu’on fait du raw ou du jpeg ? Vous, vous ferez peut-être du raw parce que vous en aurez besoin dans certaines conditions pour retravailler votre balance des blancs, nous on fait directement du jpeg. Quoi qu’il arrive. On peut se tromper dans les expos, mais en fait, quand on a une erreur d’exposition – ça m’est arrivé lors de la première journée de la ligue féminine de basket, il y avait des personnes qui utilisaient de gros flashs, et quand on prend une photo en rafales, malheureusement un coup de flash arrive et comme on est réglé pour être sans flash, l’image est toute blanche – soit la photo n’est pas récupérable, soit on essaie quand même de la récupérer.
Et les célèbres métadonnées. En plus de faire des images, on a besoin, un jour, de retrouver ces images, par des mots clés. Comme je vous le disais tout à l’heure, essayez de récupérer la feuille de match, pour mettre, sur chaque image que vous allez sélectionner et garder, le nom des joueurs. Normalement, on tague de la gauche vers la droite. Le premier joueur qui arrive sur la gauche, on met son nom, et ainsi de suite jusqu’à la droite. De plus, on met le nom du photographe, le lieu, le stade, la ville, la région, ses coordonnées, savoir si on peut l’utiliser dans telle zone géographique, France, Italie, Europe, ou Monde. Ou uniquement aux États-Unis. Il y a aussi des mots-clés qu’on peut mettre à l’intérieur. Tout ça doit être mis dans les métadonnées.
Avec quel logiciel peut-on faire ça ? Soit, c’est tout empaqueté, comme dans LightRoom, on fait tout le traitement de A à Z, tout le workflow, de l’importation jusqu’à l’exportation, voire jusqu’au transfert FTP sur un site. Soit on utilise Gimp, avec le rawthérapie, si on fait du raw, ou alors Photoshop, Photo Mechanic plus dédié aux photographes de sport, ou Photo Station. Il y a d’autres logiciels, bien entendu, je ne les ai pas tous listés. Tout ça concourt à traiter les photos et à gérer les métadonnées.
J’ai tenu mes trente minutes, je suppose que vous avez sûrement des questions à me poser. Je suis là pour y répondre, et si on déborde, on pourra se retrouver tout de suite après sur le stand Eyrolles. Je vous remercie et j’attends vos questions.
…
Combien je fais d’images sur un match ?
Ça dépend du match, ça dépend de l’évènement, ça dépend de beaucoup de choses. Sur le match PSG – OM, j’ai fait mille huit cents photos. Le match du mercredi, au bout de 54 secondes le match était plié, fini, on n’a fait que cinq cents photos. Vous voyez, même dans un match de football, c’est très variable. Et ça dépend de l’évènement. Si c’est un match de foot ou de rugby, on va dire que mille à mille deux cents photos, ça suffit largement pour tout couvrir. On fait le stade extérieur, intérieur, à moitié rempli, rempli, les spectateurs, etc. Sur un évènement sportif de type sport mécanique, là, par contre, on y est toute la journée. Obligatoirement, ça explose. De plus, on y est sur quatre jours. On fait environ six à huit mille photos sur un évènement de sport mécanique, parce qu’il y a plusieurs jours. Voilà la différence.
… :
Les cartes mémoire ?
Oui, il faut des cartes mémoire. Ne prenez pas une 32 ou 64 gigas, parce que si vous perdez une 64 gigas et que vous avez votre reportage complet, vous avez tout perdu. Il vaut mieux morceler votre reportage sur plusieurs cartes, car vous aurez au moins toujours une partie de votre reportage. Ça nous arrive. Ça m’est arrivé une fois, c’était au Red Star, je ne me souviens plus quelle équipe, et ma carte a pété. Malheureusement, c’était l’action, 1-0. Mais j’avais d’autres photos pour pouvoir illustrer avec le joueur qui avait marqué le but. Donc ça a un peu sauvé notre reportage.
D’autres questions ?
… :
Très bien. Alors, là, on en a parlé hier avec une personne aussi intéressée par le volley-ball. Elle a photographié ses petits-enfants.
Alors, le volley-ball, c’est pareil, c’est un sport qui s’ouvre vers la droite. (On va prendre n’importe quel terrain…) Si ça, c’est le filet du volley-ball, si l’équipe que vous photographiez est de ce côté-là, je vous conseille de vous mettre de ce côté-là. Ça, c’est la première chose. La deuxième chose va dépendre de la configuration du gymnase. À la salle Charpy au stade Charletty, il y a des gradins de chaque côté avec au-dessus des sortes de petits promontoires où, nous, on peut se mettre. Donc, on est largement au-dessus du filet, et quand un joueur saute, on n’a pas le filet à ce niveau-là (au milieu de la tête), on l’a ici (au-dessus de la poitrine), même s’il est en dessous du filet. Par contre, si vous allez dans des salles où il n’y a pas ces gradins derrière, comment faire ?
Vous ne pourrez pas vous mettre là, ou alors vous ferez les réceptions au sol. Ça peut être comme ça, mais vous risquez d’avoir des joueurs devant.
C’est pour ça que je vous parlais de savoir-être et comportement, essayez de demander aux arbitres, qui vous donneront peut-être l’autorisation de vous mettre soit derrière le juge de chaise ici, soit derrière le juge de ligne en face, qui vous demandera peut-être de vous mettre deux ou trois mètres derrière lui.
Si l’équipe que vous photographiez est là, mettez-vous maximum à un mètre du filet. Comme ça, vous aurez les smashes au niveau du filet. Et si vous vous mettez à environ un mètre cinquante, deux mètres du filet, vous pourrez faire les réceptions.
Voilà, est-ce que j’ai répondu à votre question ?
D’autres questions ? Pour d’autres sports ?
… :
Ça dépend si vous êtes en raw ou en jpeg. En jpeg, c’est bien entendu avant de prendre l’évènement. Vous êtes sur le bord, vous essayez d’avoir une charge de gris. Vous essayez de voir la température des couleurs. Si ce sont des LEDs, ce sera une température normale, lumière du jour, si c’est du tungstène, très orangé, essayez soit de mettre une balance tungstène, ou alors de régler un peu plus finement les températures de couleurs sur votre boîtier, si vous le pouvez, bien entendu. Après, ça dépend du boîtier que vous avez. Si vous êtes en raw, ce sera après, en post-traitement avec LightRoom ou Photoshop. Ça vous convient comme réponse ? D’accord.
… :
Alors, ça appelle peut-être deux réponses.
Pour la Formule 1, qu’est-ce qu’on utilise comme réglage ? Et peut-être, qu’est-ce qu’on utilise comme matériel ?
Je vais dire qu’il y a deux types de pays, pour la Formule 1 : il y a la France et les autres. Pourquoi ?
La France, ce sont des anciens circuits, on est donc très très loin et en téléobjectif ce sera un 600 dès le départ. On peut avoir un 400 avec un doubleur, mais un 400 et doubleur, si vous avez un f4… tout à fait monsieur, vous allez exploser. Moi, j’ai un K 400 2.8, parce que je fais très peu de sport méca, ou alors je fais des rallyes, donc je suis très proche. En réglage, on va dire qu’on peut utiliser – ce sera toujours en lumière du jour, normalement – après ça dépendra de l’effet que vous voulez réaliser. Est-ce que vous voulez d’abord saisir le pilote ? Là, il faudra privilégier une vitesse rapide.
Si vous voulez avoir un filé, une vitesse lente, bien entendu. Avec un suivi.
Après, est-ce qu’on fait une priorité à l’ouverture – ça c’est d’une manière générale pour tous les sports – ou priorité à la vitesse ? C’est important. Beaucoup de personnes pensent qu’en sport, on utilise la priorité à la vitesse. Ce n’est pas vrai. On utilise de plus en plus la priorité à l’ouverture. Parce qu’on essaye d’avoir une certaine profondeur de champ. Et c’est pareil pour le sport méca, parce que vous avez beau suivre le pilote, à un moment ou à un autre, vous tremblez, ou vous n’êtes pas à la bonne vitesse par rapport à lui, donc essayez de privilégier l’ouverture et après vous jouez avec les ISO pour essayer d’avoir une vitesse plus ou moins lente. Avec l’ouverture f/4, à 1/600e de seconde en plein jour, ça doit faire du 1/1000e de seconde, grosso modo, si je ne me suis pas trompé. Après, vous descendez encore dans les ISO, ou bien vous remontez, vous fermez votre ouverture et comme ça, vous aurez une vitesse plus ou moins lente.
D’autres questions ?
… :
Est-ce qu’en photo de sport, on utilise la rafale ? Et est-ce qu’on peut aussi maîtriser la rafale ?
Oui, on peut maîtriser la rafale. Après, ça dépend du boîtier que vous avez. Le 1dx shoote à 15/20 images/seconde, le 5d mark 3 que j’ai shoote à 6/7 images/seconde, donc on peut gérer, il n’y a pas de problème. On a tellement l’habitude que la question ne se pose même plus. Généralement, on fait toujours l’image au moment où on la déclenche. Donc, essayez de ne pas trop jouer avec la rafale pour justement avoir l’action qu’il faut. Généralement, on dit que si on voit l’action dans son viseur (même avec la rafale) c’est qu’on a loupé l’action qu’on devait faire. Eh oui, parce que ça veut dire que le miroir est baissé, donc vous voyez l’action et pendant ce temps, le capteur dort. Monsieur s’endort… Donc, si vous ne voyez pas l’action, par exemple le joueur qui commet la faute, ça veut dire que le capteur prend l’image.
Est-ce que vous avez d’autres questions ? Je pense que oui… N’hésitez pas, il n’y a aucune question tabou.
… :
Le stockage, très bonne question. C’est la première fois qu’on l’aborde en trois jours.
Comment fait-on pour le stockage des photos ?
J’ai un système de stockage, que j’ai lu dans un livre de chez Eyrolles.
J’ai deux systèmes : un système où je sauvegarde toutes mes photos, qu’elles soient loupées, mal cadrées, toutes. Sur un NAS (c’est de l’informatique, je ne vais pas rentrer dans les détails). Une fois que j’ai sauvegardé les images, je reviens sur mon reportage et je ne sélectionne que deux cents photos. Je supprime les autres (que j’ai déjà sauvegardées autre part), je les traite et je sauvegarde, une deuxième fois dans un deuxième NAS, tout le reportage. Parce que ce sont ces reportages-là que je distribue. J’ai besoin de les garder quelque part si un jour l’Express, l’Équipe, le Monde les réutilisent, pour pouvoir les retrouver et dire « ah, là, vous avez utilisé une de mes photos et vous ne me l’avez pas dit. Je vais vous envoyer la facture. »
J’ai donc deux systèmes de sauvegarde : un pour tous les reportages et toutes les photos, et l’autre que pour les reportages.
Laurent : D’autres questions ? Comme vous pouvez le voir, Éric ne mord pas et moi je fais mon travail, contrairement à il y a 5 minutes…
… : Je ne sais pas si ça peut se dire, mais combien se vend une photo de sport ou un reportage de match ?
Éric : C’est une question qui a été posée le vendredi et pas hier, donc merci de la poser. J’avais préparé la réponse.
D’une manière globale (là, il y a une erreur), pour vendre une photo, il y a deux aspects :
il faut avoir un client, déjà, quelqu’un à qui vendre ;
après, il faut pouvoir diffuser ses photos. Il y a des banques d’images, des fils photographiques et des agences.
Mais pour connaître réellement le prix d’une image, il y a plusieurs choses qui entrent en ligne de compte. Il y a des charges indirectes et directes.
Les charges indirectes, c’est votre salaire, le loyer de l’appartement. Si vous avez un bureau, vous ne gardez que 10 % de votre loyer. Il y a les fluides (eau, électricité, gaz), l’assurance, les autres charges, les frais postaux, etc. Les taxes et impôts (à ne pas oublier). Après, vous avez la périodicité : un loyer c’est mensuel, les fluides, on les paye tous les deux mois, l’assurance c’est annuel, et il faut ramener ça à la journée. Pareil pour les charges directes. Votre équipement photo, vous allez l’amortir. Votre équipement studio, si vous ne faites que du studio, ça marche dans tous les cas. Les projos, les parapluies, ça s’amortit, parce que ça s’use. L’équipement informatique, c’est pareil, il faut souvent le changer. Et si vous achetez souvent des NAS, plusieurs disques durs en réseau. Au bout d’un moment, soit il y en a un qui pète, soit ils sont complets. Les autres charges, par exemple pour un reportage à l’extérieur, il y a les frais de déplacement, l’autoroute, l’hôtel, vos repas, etc., tout ça c’est des frais directs. Vous ramenez ça en mensuel. Comme on calcule à partir d’un mois, en comptabilité, tout se calcule au 1/30e. Pour ramener tout ça à la journée, vous divisez le total par 1/30e et vous avez le coût de votre reportage à la journée.
Ici, j’ai donné des montants fictifs : en charges indirectes, j’ai 30 euros, en charges directes j’ai 45 euros, ce qui me donne un total de 75 euros à la journée. À la demi-journée, c’est plus simple : vous divisez par 2 et vous rajoutez quelque chose. Parce que, généralement, quand vous faites un reportage à la demi-journée, vous avez quand même des frais de déplacement à rajouter.
Après, sur un reportage, vous vous dites « est-ce que je vends 10 photos, quoi qu’il arrive (c’est le package) ? Ou est-ce que je vends 15 photos ? » C’est simple, vous prenez votre total général et vous divisez par le nombre de photos. Pourquoi ? Parce que ça va vous donner la photo à l’unité, si par exemple votre client veut 15 photos, mais que finalement ça ne lui suffit pas et que vous devez lui en revendre quatre, cinq ou six supplémentaires. Comment je fais ? Dans ce cas, en ayant divisé le prix à la photo, ça fait 7 euros 50, vous pourrez, les cinq photos supplémentaires, les vendre 35 euros en plus de votre reportage.
Normalement, une image, dans la presse, me revient à 70 euros bruts. Dessus on ajoute un certain pourcentage, parce qu’il faut vivre et je dois payer d’autres salaires que le mien. Dans la presse, c’est très variable. Une image dans la presse quotidienne, c’est 40 euros, donc ça veut dire que je perds de l’argent. Dans certains autres cas, par exemple VSD, cette image peut valoir plus. Parce que ça dépend du tirage. Un tirage à 10 000 ou un tirage à 100 ou 200 000 exemplaires, ce n’est pas le même tarif.
… :
La main de Thierry Henri ? Oui, c’est moi qui l’ai faite.
Alors, il y a deux aspects. Déjà, je commençais dans le métier et je me suis fait un peu avoir. C’est une exclu, car je suis le seul au monde à l’avoir faite de cette manière. Parce que d’autres photographes l’ont aussi, mais soit ils ont la main, mais pas Thierry Henri, soit ils ont Thierry Henri, mais pas la main, ou il est de dos ou de face, mais il y a toujours quelque chose qui cloche ; des joueurs ou l’arbitre qui sont devant. Donc, une exclu comme ça, ça vaut 10 000 euros. Je l’ai eu à largement moins, mais, par contre, j’ai pu décrocher d’autres contrats derrière, donc je vais dire que, indirectement, je m’y suis retrouvé.
Laurent : Est-ce qu’il y a d’autres questions ? N’hésitez pas. On a un peu de temps, en plus.
Éric : J’ai été si clair que ça ?
Laurent : Oui, ou alors tu as juste tout dit.
Éric : Oui, ou alors ils ont tous lu mon livre.
Laurent : Aussi, peut-être… Même ceux qui ont déjà posé des questions ont le droit d’en reposer.
Éric : Sinon, je serai sur le stand d’Eyrolles, venez me voir si vous êtes timides.
Laurent : Voilà, vous pouvez directement voir avec Éric si vous n’avez pas envie de poser vos questions en public.
Éric : Sinon, j’ai une adresse internet, mon site qui est là mousticproductions.fr ou .com. Sur l’un des sous-sites, il y a moyen de m’envoyer un message. N’hésitez surtout pas, je suis ouvert à toutes les questions. Il n’y a aucune question tabou, si je ne peux pas répondre, j’ai des copains qui pourront répondre. Si vous avez des questions sur des Nikon, moi, je suis une buse en Nikon parce que je suis en Canon. Je ne pourrai pas vous aider, alors qu’en Canon, je pourrai vous aider.
… :
J’étais en Sony, et j’ai switché en janvier/février. Je vais vous expliquer pourquoi. En fait, un photographe professionnel quand il tombe en panne d’appareil photo, il ne peut pas rester un mois sans appareil. J’ai contacté Sony, et malheureusement, Sony n’a pas été derrière pour m’aider. Il m’aurait prêté un appareil, je l’aurai racheté, il n’y avait aucun problème, mais ils ne m’ont pas aidé. Voyant ça, j’ai un copain qui m’a dit « Tu sais, je suis chez Canon. J’ai mon 400 2.8 qui a pété, je l’avais acheté au Japon il y a six ans, et ils sont en train de me le réparer. Et comme c’est du matériel asiatique, ils n’avaient pas la pièce, donc ils l’ont commandée, mais n’ont pas pu la recevoir. » Eh bien, ils lui ont donné le matériel de prêt. Voilà l’aspect relationnel entre certaines marques et certains photographes. Et c’est important, car un photographe professionnel ne peut pas vivre s’il n’a pas d’appareil photo. C’est pour ça que j’ai switché. Sinon, je ne fais pas de différence entre Canon, Nikon, Sony, Pentax, Sigma. Ce n’est pas l’appareil photo qui fait la photo, c’est le photographe qui fait la photo. Ça aide, bien entendu, parce qu’entre un objectif qui est un vieux caillou tout pourri et un très très bon objectif, bien entendu, c’est l’objectif qui va prédominer. Mais pour moi, il n’y a pas de grosses différences entre les marques.
Laurent : D’autres questions ?
… :
Le CSO ? Le principal conseil est de faire très attention. Le cheval, même s’il a un cavalier, est un animal. Ce qui veut dire qu’il ne peut pas toujours être maîtrisable. Ensuite, il y a la position. Généralement, il faut essayer de regarder le parcours lorsque les cavaliers le font avant le début officiel de la compétition, vous les regardez, ce qui vous permet de voir quel est le double, et la rivière, s’il y en a une, pour vous positionner par rapport à la fois au soleil et à l’obstacle. Éventuellement, essayez de vous déplacer par rapport à l’obstacle. Il y a toujours un ou deux obstacles qui ne sont pas utilisés, mettez-vous d’un côté ou de l’autre, et photographiez de face le cheval, enfin, le couple pour pouvoir l’obtenir. Et après, savoir s’il faut l’obtenir lors de son appui, lors de son envol, au-dessus ou quand il atterrit. Généralement, officiellement, les canons de la beauté pour la CSO, c’est quand il est à l’horizontale. Ça, c’est le canon de la beauté. Mais c’est comme tout le reste, on dit qu’il y a la règle des tiers en photographie, on dit qu’il y a beaucoup de choses, mais il faut toujours essayer de se sortir de ces règles-là. Vous pouvez donc les prendre au moment où il fait son appui, au moment où il décolle, et qu’il a toujours les deux pattes arrière au sol, ou carrément quand il atterrit. Pourquoi ? Parce que dans ce cas, ce n’est pas le cheval que vous allez photographier, ce sera le cavalier. Et les cavaliers, j’en connais qui ont de très belles expressions, car, comme je le disais concernant les photographes amateurs ou professionnels, certains sont plus ou moins doués. Donc vous aurez des expressions plus ou moins belles avec le cavalier quand il essaye de maîtriser son cheval.
La vitesse ? C’est pareil, si c’est l’après-midi (en général, ça se joue dans la journée), essayez de figer le saut. Pourquoi ? Parce que, comme ça, vous allez aussi figer le travail du cheval et ses muscles, et je trouve que c’est très esthétique. Sinon, si vous voulez essayer de faire, comme en sport mécanique, de la vitesse, une sorte de flou, de filé, je trouve qu’en équitation, ce n’est pas très joli. Mais c’est une position personnelle.
Laurent : Merci Éric. Y a-t-il encore des questions ? N’hésitez pas, on a encore le temps.
… : Une question au niveau du cadrage. Est-ce que la règle des tiers est toujours vraie en sport ? Ou est-ce qu’on peut déroger un peu ? On a l’impression que le sujet est plus centré que sur d’autres photos.
Éric : On va prendre celle-ci. Est-ce que cette image est centrée ou pas ? Bon, j’ai un peu triché tout à l’heure en disant que je n’avais pas croppé. J’avais légèrement croppé, parce qu’en fait, on ne s’embête pas. On prend en pleine pastille, sinon l’AF merdouille, quoi qu’il arrive, et on ne peut pas avoir un suivi. Mettez-vous en pleine pastille et vous photographiez. Après, vous essayerez de jouer la règle des tiers. Sinon, comme avec Cavani, ici, on voit qu’il est centré. De toute façon, c’est simple, la presse veut que ce soit centré.
Il ne faut pas trop serrer à la prise de vue, et après on peut serrer au recadrage pendant le retraitement.
Laurent : Quoi d’autre ? Parce que j’ai cru qu’on avait fini les questions, trois fois, et puis il y en a encore. Je suis sûr qu’il y en a encore d’entre vous qui en avez, alors n’hésitez pas.
Merci pour cet interview, très enrichissante et comme l’indique Laurent. J’ai aussi cru que l’interview se terminait plusieurs fois, mais pour mon plus grand plaisir, j’ai continué de boire les paroles.
A mon “petit” niveau de photographie, j’utilise les meta données, mais c’est surtout pour avoir des réflexes pour trouver des photos que j’ai shooté en rafale parfois, plus rapidement sur mes disques durs.
La photo de sport, c’est vraiment très particulier. Il faut à la fois connaître le sport et les attitudes des sportifs intéressantes à capter. Mais aussi maîtriser tout le bagage technique de prise de vue. Le compte-rendu de cette conférence est passionnant.
Wahou ! 1800 photos sur un match c’est assez impressionnant ! Il faut avoir la gâchette facile et pas peur du traitement après 😉
Bonjour,
Merci à vous Laurent et à Eric Balédent pour la conférence.. c’est intéressant !!!
Pfffui 1800 photos sur un match !
Quand je pense au temps qu’il me faut pour 80 photos, choisir celles que je selectionne et traite .
Je suis admiratif, c’est vraiment un job particulier faut pas avoi les 2 pieds dans le meme sabot.
Excellent,
cette conférence répond à pas mal de questions que je me posaient.
Je me lance dans la photo du sport que je pratique, le jiu jitsu brésilien, et il y a plein de facteur que je n’avais pas pris en compte comme le relationnel, la feuille de match, l’ouverture du corp.
Cela va conditionné l’achat de mon prochain objectif, sans doute un 50mm f1,4 et de mon prochain boitier, nikon D5300 (c’est ce qui est dans mes moyens).
Par contre je ne deviendrais pas photographe de sport professionnel car ça à l’air vraiment éprouvant.
merci Laurent pour cette vidéo
conférence très intéressante sur un domaine qui m’étais assez étranger merci
une information large sur les différents aspects de cette pratique.
j’ai appris plein de choses
Bonjour
Un grand merci pour la conférence
Jai très apprécier ce vidéo merci
Drole de hasard, j’ai lu son livre il y a moins de deux semaines…livre que j’ai beaucoup aimé.
Malheureusement, comme je demeure au Canada, notre sport national est le hockey…et il n’a pas été traité ni dans la conférence, ni dans le livre.
Et l’éclairage en aréna et à travers les baies vitrées represente un gros défi…
Malgré tout j’ai été ravi de voir la conférence
Merci