john yokko annie leibovitz

Dans cette vidéo, découvrez la vie et l’œuvre d’Annie Leibovitz, qui aura marqué l’histoire de ses portraits.


 
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1er juin 1975. Les Rolling Stones démarrent leur tournée américaine dans la petite ville de Baton Rouge, en Louisiane. C’est le début d’une tournée légendaire de 46 concerts qui sera couverte par Annie Leibovitz, l’incroyable photographe que je vous propose de découvrir aujourd’hui.

Alors photographe en chef du magazine Rolling Stone depuis 2 ans, et seulement âgée de 26 ans, Annie Leibovitz a déjà eu l’occasion de photographier l’un des groupes les plus légendaires du rock n’ roll plusieurs fois auparavant, dans les coulisses de leur précédente tournée.

Ses images intimistes montrent un Keith Richards endormi (ou inconscient) ou un Mick Jagger en robe de bain dans un ascenseur.

Elles sont emblématiques de la première partie de sa carrière, qui la verra photographier de nombreuses stars dans des moments authentiques, intimes, dans un témoignage incroyable de l’effervescence artistique de l’époque.

Tournées démesurées, fans en délire, drogues, arrestations par la police font la une des journaux.

Mais les images de Leibovitz donnent l’occasion de voir l’envers du décor, et de documenter la réalité quotidienne de grands artistes dans leurs meilleurs et leurs pires moments. Cette période ne sera d’ailleurs pas sans conséquence sur sa santé.

Dans les années suivant cette tournée, Leibovitz commence à réaliser des portraits plus posés, en studio, avec un appareil moyen format. Elle réalisera des portraits légendaires pendant cette période, notamment celui de Meryl Streep, Whoopi Goldberg dans un bain de lait, ou encore Demi Moore enceinte posant nue. Dans le contexte de l’époque, ces photos sont clairement provocatrices, et font parler d’elles.

Le 8 décembre 1980, elle réalise cette image iconique de John Lennon nu, lové près de Yoko Ono, qui elle avait refusé de se déshabiller.

Quelques heures plus tard, John sera assassiné à l’entrée du Dakota Building à New York. Cette image prendra alors une toute autre signification sur ce qui restera sans doute la couverture la plus célèbre de Rolling Stone.

En 1983, elle quitte Rolling Stone pour Vanity Fair, puis pour le magazine Vogue. Elle y continuera de photographier les grands de ce monde, en se dirigeant vers des portraits davantage mis en scène : les décors sont soignés, les tenues travaillées, et Leibovitz s’entoure d’une équipe d’assistants pour réaliser des shootings à l’esthétique bien choisie.

Malgré cette complexification, Leibovitz conserve une authenticité dans ses portraits : le regard, la pose, la tenue… il y a toujours quelque chose mettant en valeur la personnalité de son modèle.

Si on analyse davantage son style, on remarque tout d’abord une esthétique très picturale : ce sont des tableaux photographiques. La lumière douce qui baigne la scène, les poses travaillées des modèles, les arrière-plans unis ou au contraire dans le luxe de châteaux, l’ambiance générale… tout ceci contribue au style Leibovitz, librement inspiré de peintures de la Renaissance.

Dans ses images aux plans plus larges et regroupant souvent plusieurs sujets, on peut également faire un parallèle direct avec le cinéma, comme dans cet incroyable portrait de Jack Nicholson.

Et dans ses portraits plus serrés, Leibovitz utilise souvent une toile de fond peinte à la main de type Oliphant, clairement inspirée par un autre incroyable photographe de portrait : Irving Penn, dont je vous parlerai bientôt.

Par ailleurs, elle n’hésite pas à utiliser largement le traitement pour obtenir cette ambiance bien particulière, et même à fusionner plusieurs images ensemble pour obtenir le meilleur d’une scène, dans des conditions où les sujets n’ont pas toujours beaucoup de temps à lui accorder. Bien qu’elle ait commencé en argentique, elle a donc parfaitement adopté la transition avec le numérique.

Mais Leibovitz ne peut pas être limitée au brillant des pages de magazines. Son œuvre se poursuit dans l’intimité également : on peut citer l’incroyable portrait de sa mère et les photos de Susan Sontag, qu’elle aimait profondément, sur son lit de mort.

Ce qui me donne l’occasion de vous parler du livre de Leibovitz que je préfère : Women. Il inclut la photo de sa mère, et est accompagné d’un texte de Susan Sontag, déjà habituée à écrire sur le sujet avec son célèbre livre “Sur la Photographie”.

Ce livre réunit tout ce que j’admire dans la photographie de Leibovitz, et symbolise également son engagement féministe : il réunit des portraits de femmes célèbres ou non, toutes fortes, authentiques, et complètement à l’opposé des clichés des magazines. C’est un de mes livres de portrait préférés, et je le vous conseille vivement pour découvrir une Leibovitz libérée de toute contrainte, même s’il est aujourd’hui plus difficile à trouver.

Si vous ne pouvez pas le trouver, ou si vous en voulez un second, je vous recommande vivement son livre A photographer’s life : 1990-2005, qui est absolument excellent (et à mon avis meilleur que son dernier livre 2005-2016). Il montre parfaitement à quel point Leibovitz a la photographie dans le sang, qui véritablement fait partie de sa vie. Il inclut la série de photos de Susan Sontag décédée dont je parlais auparavant, ainsi que des photos à l’enterrement de son propre père. C’est assez incroyable qu’on puisse avoir la force de prendre l’appareil dans un moment aussi bouleversant pour soi..

Enfin, si vous souhaitez en savoir plus sur la vie et l’œuvre de Leibovitz, je ne peux que vous recommander l’excellent documentaire “Life Through a Lens” sorti en 2006, et pour le moment disponible sur YouTube avec le lien que je vous mets en description. Vous y verrez une Annie Leibovitz habitée par son art, qui pense, vit et respire photographie. Une véritable inspiration pour nous tous.

 

 

Laurent Breillat
J'ai créé Apprendre.Photo en 2010 pour aider les débutants en photo, en créant ce que je n'avais pas trouvé : des articles, vidéos et formations pédagogiques, qui se concentrent sur l'essentiel, battent en brêche les idées reçues, tout ça avec humour et personnalité. Depuis, j'ai formé plus de 14 000 photographes avec mes formations disponibles sur Formations.Photo, sorti deux livres aux éditions Eyrolles, et édité en français des masterclass avec les plus grands photographes du monde comme Steve McCurry.
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