Après l’article sur l’exposition en général et sa suite concernant l’ouverture du diaphragme (que vous DEVEZ lire pour comprendre cet article), abordons aujourd’hui la vitesse d’obturation, autre “angle” de notre triangle de l’exposition.

Mal maîtrisée, la vitesse d’obturation peut gâcher vos photos voire vous frustrer si vous ne la comprenez pas du tout. Sur le modèle de l’article sur l’ouverture, découvrons ensemble la théorie et la pratique sur cet aspect fondamental de la photographie. Suivez le guide !

Note : plus récemment, j’ai réalisé une vidéo courte pour vous expliquer la vitesse d’obturation (ou temps de pose). Si vous préférez ce format ou que vous voulez voir ce concept expliqué d’une autre façon, la voici 😉

Comprendre la vitesse d’obturation

Qu’est-ce que la vitesse d’obturation ?

La vitesse d’obturation est le temps pendant lequel l’obturateur de l’appareil photo reste ouvert pour laisser entrer la lumière sur le capteur. Comprendre la vitesse d’obturation est crucial car elle influence directement le look de vos images, permettant de figer des moments ou de créer des effets de flou artistique.

Elle est mesurée en secondes ou en fractions de seconde et peut varier en général de 30 secondes à 1/4000ème (ou 1/8000ème) de seconde sur les appareils photo. Comme la vitesse d’obturation s’exprime en secondes (par exemple 1/10s, 3s, etc), c’est bel et bien une durée et on l’appelle également temps de pose, logique !

image vitesse d'obturation rapide
Cette photo a été prise avec une vitesse d’obturation de 1/1600s

Analogie vitesse d’obturation et ouverture de la fenêtre

Non, je ne vous prend pas pour des enfants, c’est juste que cette analogie est je trouve assez parlante pour comprendre !

Imaginez que êtes confortablement installé dans votre canapé, mais que vous avez froid. Vous ouvrez donc les rideaux devant votre fenêtre pour prendre le soleil.

“Affalé sur le canapé” serait plus juste 🙂

Si vous ouvrez les rideaux pendant une courte durée, le soleil n’aura pas le temps de vous réchauffer. En revanche, si vous les laissez ouverts plus longtemps, vous ressentirez une douce chaleur vous envahir progressivement 🙂 C’est normal, vous avez reçu plus de lumière !

capteur appareil photo
Le capteur est comme vous dans votre canapé, il reçoit de la lumière

Et bien de la même manière, une vitesse d’obturation rapide (comme 1/4000ème de seconde) laisse entrer moins de lumière, tandis qu’une vitesse d’obturation lente (comme 30 secondes) permet à plus de lumière d’atteindre le capteur.

Les impacts de la vitesse d’obturation sur la photo

On va en revenir en détail, mais la vitesse d’obturation a un impact direct sur le rendu de vos photos. Une vitesse d’obturation plus longue entraînera une exposition plus longue et donc un flou de mouvement si le sujet est en mouvement. Par exemple, si vous photographiez une rivière avec une vitesse d’obturation lente, l’eau apparaîtra douce et soyeuse, créant un effet de flou artistique. Je vous mets juste ici une image pour illustrer ce rendu que vous connaissez sans doute déjà.

photo exemple vitesse obturation lente, effet filé cascade
On a tous eu envie de reproduire à nos débuts ces photos de cascade, donc ne vous privez pas (mais après vous verrez on se lasse un peu)

En revanche, une vitesse d’obturation plus courte permet de figer le mouvement et de capturer des images nettes. C’est idéal pour photographier des sujets en mouvement rapide, comme des sportifs ou des animaux. Par exemple, pour capturer ce nageur en plein effort, une vitesse d’obturation rapide comme 1/600ème de seconde est nécessaire pour éviter le flou et obtenir une image nette. Vous voyez que le nageur est net, mais les petites gouttes autour pas tout à fait. Si on avait voulu tout figer, il aurait fallu choisir une vitesse encore plus rapide, 1/2000s par exemple, mais cela aurait obligé à monter encore plus dans les ISO pour maintenir une photo bien exposée (car on est déjà à ouverture max f/2.8).

photo exemple vitesse obturation rapide
Non, ce n’est pas Léon Marchand ^^

Vous l’avez compris : une vitesse d’obturation rapide peut également vous obliger à compenser en ajustant l’ouverture ou la sensibilité ISO de votre appareil photo. En jouant avec ces paramètres, vous pouvez trouver le bon équilibre entre netteté et luminosité pour obtenir des photos fidèles à l’effet que vous voulez restituer.

Comment choisir la vitesse d’obturation en pratique ?

Le choix de la vitesse d’obturation dépend de plusieurs paramètres :

  • votre intention : voulez-vous figer votre sujet ou bien montrer un flou pour suggérer le mouvement ? Une vitesse d’obturation rapide est idéale pour figer des sujets en mouvement rapide comme des sportifs ou des animaux.
  • le sujet : plus il est rapide, plus il vous faudra une vitesse rapide pour le figer et éviter le flou de mouvement du sujet (mais vous pouvez avoir envie de provoquer volontairement un flou de mouvement)
  • la focale utilisée : plus la focale est grande, plus vous aurez besoin d’une vitesse rapide pour compenser vos propres mouvements (pour éviter ce qu’on appelle le flou de bougé du photographe)
  • votre stabilité : sur trépied, vous ne serez pas embêté par vos mouvements parasites, et donc votre vitesse d’obturation peut être plus faible qu’à main levée (sauf si votre sujet bouge vite !). Une vitesse d’obturation lente permet de capturer plus de lumière dans des conditions sombres ou de créer des effets de flou de mouvement.
photo exemple vitesse obturation lente pose longue
Les traînées lumineuses sur une route : vous pouvez facilement vous entraîner à réaliser ce type de photo pas loin de chez vous !

Où voir la vitesse d’obturation sur l’appareil ?

La vitesse d’obturation est bien visible sur l’écran arrière de votre appareil photo, quel que soit le mode que vous utilisez. Les différents réglages de l’appareil photo influencent la prise de vue, notamment en ce qui concerne le flou de mouvement et la capture d’images nettes. Souvent, pour gagner de la place, les constructeurs n’affichent que le dénominateur : 60 pour 1/60s. Quand la vitesse s’élève à plusieurs secondes, disons 3s, l’affichage sera 3”, pour ne pas créer l’ambiguïté avec 1/3s 🙂

vitesse d'obturation sur écran arrière
Sur l’écran arrière, SS 60 en bas à gauche signifie Vitesse d’obturation 1/60s (Shutter Speed en anglais)

Comme on l’a dit plus haut, cette vitesse s’exprime en secondes, et plus communément en fractions de secondes : 1/125s, 1/3200s, etc… Plus la vitesse est élevée, moins le temps pendant lequel vous ouvrez la fenêtre est long, moins vous laissez rentrer de lumière. Ainsi, vous laisserez rentrer plus de lumière à 1/125ème de seconde qu’à 1/3200ème de seconde, par exemple (vous pouvez faire les divisions à la calculette, vous verrez que 1/125 est plus grand que 1/3200).

vitesse d'obturation sur écran LCD supérieur
La vitesse d’obturation s’affiche aussi sur l’écran LCD supérieur, pour les appareils qui en ont un (ici elle vaut 1/4000s)

Les appareils photos vous permettent en général d’utiliser des vitesses très rapides (1/4000ème ou 1/8000ème de seconde par exemple), des vitesses très lentes (30 secondes ou plus, pour faire des poses longues), et bien sûr toutes les vitesses plus classiques entre les deux. Vous pouvez aussi aller au delà, mais cela nécessite en général l’usage d’une télécommande.

Comment régler la vitesse d’obturation sur un appareil photo ?

Pour régler la vitesse d’obturation sur un appareil photo, vous devez être en mode priorité à la vitesse (mode S ou mode Tv), ou en mode manuel (ou mode M). Il vous suffit alors de tourner la molette dédiée à la vitesse pour choisir la valeur de votre choix.

En général vous avez au moins deux molettes sur les boîtiers : une sous l’index à côté du déclencheur, et une sous le pouce. Ici sur le Sony A7 IV, vous en avez une troisième, aussi sous le pouce. En mode semi-automatique (A ou S), vous pouvez affecter l’ouverture ou la vitesse à une molette, les ISOs et la correction d’exposition aux deux autres (mais pas obligé)

photo molette vitesse d'obturation  sur appareil photo

Si ce n’est pas déjà fait, et pour plus de détails, allez lire l’article sur les modes de l’appareil photo et tout s’éclairera d’une lumière généreuse et limpide (oui, je tente des tournures poétiques pour retenir votre attention).

En mode manuel (M)

En mode manuel, quand vous tournez la molette, vous modifiez directement la vitesse d’obturation. Non, ce n’est pas plus compliqué que ça. Et oui, c’est tout.

Là encore, modifier cette vitesse influe sur l’exposition et il faut compenser avec l’ouverture ou les ISO. Je vous déconseille donc (encore 😉 ) d’utiliser ce mode tant que vous n’avez pas compris tous les tenants et les aboutissants de l’exposition, ou tout au moins les bases (c’est-à-dire après l’article sur les ISO ! 😀 )

Et si vous débarquez sur le blog, regardez juste cette vidéo où je bas en brèche l’idée selon laquelle le mode manuel c’est mieux dans l’absolu :

En mode priorité à la vitesse d’obturation (Tv ou S)

Encore une fois, je vais légèrement me répéter : dans ce mode, votre priorité est de régler la vitesse d’obturation (on verra dans quels cas juste après). Vous ne réglez que la vitesse, et l’appareil fait le reste, c’est-à-dire qu’il s’occupe de l’ouverture et des ISO (là encore si vous avez laissé l’option ISO auto).

Le flou de bougé

Le flou de bougé est un flou dû aux mouvements du photographe

Vous devez souvenir que dans l’article sur l’ouverture (décidément), nous avons vu le flou d’arrière-plan (ou “bokeh“, pour ceux qui aiment le jargon 😉 ). Ce flou est en général voulu et peut être simplement contrôlé grâce à l’ouverture.

Il existe également d’autres types de flou, dont le fameux “flou de bougé“, qui est dû aux mouvements du photographe, comme on l’a dit. Ce flou est en général indésirable, et vous allez chercher à l’éviter dans 98% des cas. Regardez comme c’est moche quand c’est involontaire :

flou de bouge vitesse d'obturation
Cette (très vieille) photo toute moche est prise à 1/5s : la vitesse est insuffisante et mon mouvement se voit sur l’image. C’est flou, on ne voit rien, bref : on veut éviter ça.

Qu’est-ce qui influence le flou de bougé ?

La vitesse d’obturation influence fortement la présence ou non de flou de bougé pour plusieurs raisons :

  • La stabilité du photographe : c’est tout bête, mais si vous vous tenez sur un pied pour imiter le flamand rose, ou si vous avez 2g d’alcool/litre de sang (ou autres substances tueuses de neurones 😛 ), vous allez davantage bouger et donc l’appareil aussi. Par ailleurs, il faut tenir son appareil de la bonne façon, et pour ça je vous renvoie à mon article sur les conseils de base !
J’aurais pu mettre quelqu’un avec 2g/litre, mais ça aurait compromis certaines réputations ! 😛

Cela dit, même si vous vous tenez bien en équilibre sur vos 2 pieds et avez la même hygiène de vie qu’un moine bouddhiste (qui de plus ne boit jamais de café), il subsistera toujours des micro-mouvements qui provoqueront du flou de bougé. Globalement, en dessous d’une vitesse de 1/60ème, vous commencez à risquer un flou de bougé si vous ne faites pas attention.

  • La longueur focale : plus la distance focale (le “zoom”) est importanteplus vous serez susceptibles d’avoir un flou de bougé tout moche sur vos clichés. Pour ceci, retenez une règle simple : à 50mm, pas plus lent que 1/50ème, à 100mm, pas plus lent que 1/100ème, etc…

    (Pour les utilisateurs un peu plus avancés, ça nécessite une précision : sur des petits capteurs, la focale doit être multipliée par un nombre entre 1,5 et 2 à cause du facteur de conversion)
photo tenue appareil pour éviter flou de bougé
En théorie, en équivalent 200mm, vous devez shooter à 1/200s ou plus rapide pour éviter le flou de bougé

  • La stabilisation ou non de l’objectif (ou de l’appareil) : la plupart des hybrides modernes sont équipés de stabilisation qui compensent vos micro-mouvements.

    Elle est parfois intégrée au boîtier, et donc active quel que soit l’objectif utilisé, et parfois intégrée aux objectifs, et dans ce cas il faut donc veiller à ce qu’elle soit présente. Quand le boîtier et l’objectif sont stabilisés, les stabilisations peuvent se combiner et les performances améliorées 😀 En gros, c’est comme si votre capteur et/ou les lentilles de l’objectifs étaient tenus par des petits ressorts qui peuvent bouger pour compenser vos mouvements.
stabilisation objectif et capteur canon
  • Ce dispositif permet de faire gagner en moyenne 2 à 4 crans sur la vitesse d’obturation (6 à 8 sur les meilleurs modèles).

    Autrement dit, vous pouvez réduire d’au moins 2 crans les valeurs théoriques citées dans les points précédents. Mais en théorie seulement, en pratique ce n’est pas toujours aussi spectaculaire (vous en verrez surtout l’effet en photographiant au téléobjectif et donc à des longueurs focales importantes). Evidemment, vous comprenez bien que ce dispositif ne peut rien faire contre les mouvements de votre sujet, c’est bien d’une compensation de vos propres mouvements parasites qui créent le flou de bougé dont on parle ici !

    Lisez mon article sur la stabilisation en photo pour en savoir plus 🙂
stabilisation objectif photo

Le flou de mouvement du sujet

Le flou de mouvement du sujet est le flou créé par le sujet que vous photgraphiez, car il a bougé pendant que l’obturateur de l’appareil photo était ouvert.

Ça arrive donc quand votre appareil est relativement stable mais que votre sujet bouge : votre sujet (une personne, un animal, etc…) pourra être flou sur le cliché. Ce flou de sujet est influencé par 2 facteurs :

  • la vitesse de mouvement de votre sujet : plus il bouge vite, plus vous aurez de flou de sujet et inversement
  • la vitesse d’obturation : plus elle est faible (lente), plus vous obtiendrez de flou de sujet et inversement.

Autant vous ne pouvez pas tellement jouer sur la vitesse de votre sujet, autant c’est à vous de choisir quelle vitesse d’obturation utiliser, selon la photo que vous souhaitez obtenir. Tout dépend si vous souhaitez figer un sujet rapide, comme par exemple ce guépard qui s’ébroue (prise à 1/500ème), ou si vous souhaitez donner une impression de mouvement comme je l’ai fait avec les passantes (photo prise à 1/8ème).

photo vitesse d'obturation élevée
Ici j’ai du utiliser une vitesse de 1/500 pour figer le mouvement du guépard qui s’ébroue, et les gouttes d’eau qui sont projetées. L’objectif n’ouvrant qu’à f/6.3, j’ai du monter les ISO à 5000 pour avoir une image bien exposée !
photo vitesse obturation lente flou bougé volontaire
J’ai volontairement pris cette photo à 1/8 pour que les passants soient floutés par leur mouvement. J’ai réussi à avoir le chien net en me stabilisant bien (coudes contre le corps), et grâce à une très bonne stabilisation.

Dans ce domaine, il est impossible de donner des cas typiques ou des conseils selon la situation. Par exemple, en photographie de sport, on peut donner une impression de rapidité à la fois en figeant le mouvement (grâce à une vitesse d’obturation importante) ou en créant un peu de flou de sujet (grâce à une vitesse d’obturation plus faible). Ça fait partie des leviers pour développer votre créativité, et si vous êtes déjà à cette étape dans votre pratique, regardez la vidéo de présentation de Révéler votre Âme de Photographe, ça va vous parler 🙂

Bref, vous avez compris, il vous incombe de prendre cette décision sur la vitesse, et pour ça rien ne vaut des tests ! Je vous laisse donc vous amuser avec la vitesse d’obturation puis découvrir l’article sur la sensibilité ISO.

En conclusion

En résumé, la vitesse d’obturation est un paramètre fondamental en photographie qui permet de contrôler la durée d’exposition de l’appareil photo. Elle a un impact direct sur le rendu de vos photos et doit être choisie en fonction du sujet, de la lumière et du mouvement.

Et comme vous l’avez compris, ce n’est pas “juste” un réglage technique, qui serait correct ou incorrect. Non, le choix de la vitesse d’obturation est lié à votre intention photographique, qui va vous permettre de la restituer dans votre image.

N’hésitez pas à expérimenter avec différentes vitesses pour découvrir les possibilités créatives qu’elles offrent et améliorer la qualité de vos clichés. Et d’ailleurs, si vous ne savez pas comment régler votre appareil pour figer le mouvement ou au contraire faire de beaux filés, regardez le détail de notre formation Photographier le mouvement qui pourrait bien vous réconcilier avec la photo d’action 😉

Comme d’habitude, laissez un commentaire pour donner votre avis sur l’article, poser des questions, ou me contredire (sans me jeter des cailloux svp) ! Et n’oubliez pas de partager l’article ! 🙂

Testez-vous en 3min pour voir si vous avez tout compris !


 

 

Laurent Breillat
J'ai créé Apprendre.Photo en 2010 pour aider les débutants en photo, en créant ce que je n'avais pas trouvé : des articles, vidéos et formations pédagogiques, qui se concentrent sur l'essentiel, battent en brêche les idées reçues, tout ça avec humour et personnalité. Depuis, j'ai formé plus de 14 000 photographes avec mes formations disponibles sur Formations.Photo, sorti deux livres aux éditions Eyrolles, et édité en français des masterclass avec les plus grands photographes du monde comme Steve McCurry.
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