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En quoi ce vase peut-il vous aider en photographie ?

À moins que ce ne soient… 2 visages qui se font face.

Aujourd’hui, je vais vous parler de la théorie de la perception figure-fond. Ne vous jetez pas par la fenêtre, c’est simple et ça va beaucoup vous aider en photo.

Ce concept est issu de la théorie de la Gestalt, développée par des psychologues allemands et autrichiens au début du XXe siècle. Cet instant Wikipédia étant maintenant terminé, je vous passe les détails pour me concentrer sur Edgar Rubin.

En 1915, il développe ce concept de la perception figure-fond, illustré avec ce vase aux deux visages. L’idée est très simple : quand on regarde une image, on la simplifie en séparant d’un côté la figure, et de l’autre le fond.

La figure, c’est le sujet ou l’objet que vous percevez. Sur cette image, c’est clairement l’écureuil.

Le fond, c’est tout ce qui est à l’arrière-plan. Ici, le parc.

Si je vous montre cette image, il y a de fortes chances que vous voyiez un cercle blanc sur un fond noir. La figure est le cercle, et le fond est l’arrière-plan noir.

Mais comme pour le vase de Rubin, vous pouvez aussi imaginer que c’est un rectangle noir… avec un trou dedans.

Pour parler en termes plus photographiques, cet exemple illustre un fort contraste entre la figure et le fond, quelque soit ce que vous percevez comme figure.

A l’inverse, vous pouvez aussi avoir… un contraste faible entre la figure et le fond. C’est un peu comme écrire à l’encre blanche sur du papier. La raison pour laquelle nous sommes capable de lire, c’est justement cet effet de perception figure-fond.


Mais alors, à quoi ça vous sert en pratique ? Eh bien, en photo et dans les arts visuels en général, on va le plus souvent rechercher un fort contraste entre la figure et le fond.

En français : on va chercher à ce que le sujet se détache bien de l’arrière-plan, qu’il soit parfaitement différenciable, et donc que l’image soit plus facile à lire. Ce qui simplifie et renforce votre message.

Cette stratégie est apparue pour répondre à un problème simple : une toile ou une photographie sont en deux dimensions, alors que la réalité est en 3 dimensions, ou en davantage si vous n’avez pas bu que de l’eau. Le défi est donc de tricher avec le cerveau pour qu’il perçoive cette profondeur sans les indices des 3 dimensions.

Et les peintres l’ont compris depuis longtemps.

L’exemple le plus simple est sans doute la Joconde. Pour la peindre, De Vinci a utilisé un effet qu’on pourrait presque qualifier de faible profondeur de champ : l’arrière-plan est flou, ce qui contribue à mieux distinguer la figure du fond.

Mais ce principe se retrouve dans tous les courants et à toutes les époques. Pour bien le voir, il suffit de flouter l’image. Malgré le manque de détail, on distingue toujours bien les formes le sujet et l’arrière-plan.

Même sur des toiles plus impressionnistes, où on pourrait justement penser que cette distinction est plus faible, on réalise que le sujet est malgré tout bien séparé du fond.

Si vous voulez constater cet effet la prochaine fois que vous allez au musée, vous pouvez soit retirer vos lunettes si vous êtes bigleux comme moi, ou vous éloigner d’environ 3 fois la hauteur de la toile, en plissant les yeux jusqu’à temps que ce soit flou.


Mais intéressons nous à l’application pratique de ce principe en photographie.

En général, la figure est simplement votre sujet : souvent c’est un humain, un animal ou un objet, quelque chose de reconnaissable. Vous avez plusieurs moyens à votre disposition pour les différencier.

  1. Le flou

Si votre sujet est net et votre arrière-plan flou, c’est une excellente manière de séparer la figure et le fond.

  1. Les tonalités

Qu’il y ait une différence de netteté ou non, un deuxième levier est très important : la différence de tonalités, c’est-à-dire si l’élément est sombre ou clair. Il est évident qu’un sujet clair sur fond sombre, ou inversement, sera très lisible et facilement distingué par le cerveau.

Un bon moyen de vérifier si votre photo utilise les tonalités est de passer la photo en noir et blanc : vous allez tout de suite voir la différence.

  1. La teinte

Si deux éléments ont presque la même tonalité, bref s’ils sont aussi lumineux l’un que l’autre, on peut encore les distinguer par une autre caractéristique : leur teinte, c’est-à-dire leur élément de couleur si vous préférez. Alors qu’en noir et blanc vous ne voyez pas ce cercle, en couleurs, vous le distinguez parfaitement. En photo, deux éléments de luminosité similaires mais de couleurs différentes vont bien se détacher l’un de l’autre.

Comme vous vous en doutez, un bon contraste figure-fond a été utiliser par les plus grands : Henri-Cartier Bresson, Willy Ronis, plus récemment Vincent Munier. TOUT. LE. MONDE.

En pratique, j’ai deux démarches différentes pour appliquer ce principe à mes photos :

A. D’une part, j’ai un sujet, et je me place par rapport à lui pour qu’il se détache bien de l’arrière-plan. Pour ces deux images, je me suis placé volontairement à contre-jour pour créer un effet de silhouette, qui permet de bien détacher la figure sombre sur le fond lumineux.

B. Et d’autre part, j’ai un arrière-plan et une composition que je trouve intéressantes, et j’attends qu’un sujet vienne s’intégrer dans la scène pour venir l’animer. Ici, le sujet plutôt lumineux se détache du fond sombre.

Notez la différence que ça fait quand il est sur le fond plus lumineux des maisons : la photo perd en force. Elle n’est pas mauvaise en soit, mais au tri, je choisis l’autre sans hésiter, car elle est bien plus lisible.

Ici encore, si le personnage était à moitié derrière un pilier, la photo ne serait pas lisible et serait à éliminer.

À l’inverse, sur ces deux images, la distinction figure/fond est moins claire, en raison des tonalités proches. Elles perdent en force et sont clairement de moins bonnes images.


Alors comment appliquer ce principe à vos photos ?

 

  1. Vous pouvez trouver un arrière-plan, un cadre avec une composition esthétique et attendre qu’un sujet passe devant, ce qui sera en général plus efficace que de prendre la photo d’un sujet intéressant avec un arrière-plan choisi au pif.

 

  1. Pensez également à observer la lumière. vous placer à contre-jour, c’est-à-dire avec la lumière en face, vous permettra de faire des effets de silhouette qui peuvent être très intéressants en termes de contraste, si vous faites attention à la lisibilité. Un rayon de lumière sur fond sombre peut également vous aider.

 

  1. Au post-traitement, pensez à utiliser la technique du dodge & burn, que j’explique dans une autre vidéo. Elle permet de renforcer un contraste figure-fond déjà présent s’il est un peu léger à la base.

 

  1. Selon la situation, vous pouvez tout simplement demander au sujet de bouger !

 

  1. Un excellent exercice est également de penser en noir et blanc, pour vous sensibiliser au contraste de tonalités. Vous pouvez faire l’exercice de shooter uniquement en noir et blanc pendant une semaine, si possible en visée par écran pour voir directement à la prise de vue.

Et surtout pour finir, gardez en tête que ce concept n’est pas une règle, mais un outil, que vous utilisez à votre guise. Libre à vous de l’utiliser pour montrer quelque chose, ou au contraire… pour le camoufler…

Merci beaucoup d’avoir regardé cette vidéo, j’espère qu’elle vous aidera lors de vos prochaines prises de vues. Pensez à lâcher un pouce bleu, la partager à vos amis, et si vous découvrez la chaîne à vous abonner pour ne pas rater les suivantes.

C’est un nouveau format, j’attends donc vos retours avec impatience : pensez à commenter pour me dire ce que vous aimez, ça m’aidera pour la prochaine vidéo.

D’ici là à bientôt, et bonnes photos !

 

 

Laurent Breillat
J'ai créé Apprendre.Photo en 2010 pour aider les débutants en photo, en créant ce que je n'avais pas trouvé : des articles, vidéos et formations pédagogiques, qui se concentrent sur l'essentiel, battent en brêche les idées reçues, tout ça avec humour et personnalité. Depuis, j'ai formé plus de 14 000 photographes avec mes formations disponibles sur Formations.Photo, sorti deux livres aux éditions Eyrolles, et édité en français des masterclass avec les plus grands photographes du monde comme Steve McCurry.
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