On a pas mal parlé de profondeur de champ précédemment, et comment jouer avec pour obtenir un flou d’arrière-plan ou même un flou d’avant-plan. Mais si vous souhaitez maximiser la profondeur de champ intelligemment, notamment si vous faites de la photo de paysage ou de reportage, vous pourriez être intéressé par la technique de l’hyperfocale.

(Je vous conseille de lire et de comprendre les articles que je donne en lien ci-dessus avant de vous attaquer à celui-ci, ce sera plus logique et plus simple 😉 )

Oui, encore un nom barbare 😀 Rassurez-vous, on va y aller doucement, ça ne fera même pas mal 😛 Et le jeu en vaut la chandelle, car en connaissant et en utilisant l’hyperfocale, vous pourrez obtenir la plus grande zone de netteté possible. Et oui, c’est un peu plus compliqué que de mettre au point à l’infini !

En photo de paysage par exemple, il est assez important d’intégrer un avant-plan à l’image pour lui donner de la profondeur et d’augmenter son impact. Or en mettant au point à l’infini, vous obtiendrez souvent un avant-plan flou, ce qui n’est pas le but. L’hyperfocale va vous permettre de changer ça.

Paysage pris en hyperfocale netteté
Un exemple de ce que permet de faire l’hyperfocale : un paysage net de l’avant-plan jusqu’à l’infini (Licence CC BY-NC-SA jordi puig)

La distance hyperfocale c’est quoi ? Définition

Quand la mise au point est effectuée sur la distance hyperfocale, la profondeur de champ s’étend de la moitié de cette distance hyperfocale jusqu’à l’infini.

Autrement dit, c’est la distance entre l’appareil photo et le début de la zone de netteté quand la mise au point est faite sur l’infini.

Donc faire la mise au point sur l’hyperfocale (c’est-à-dire à un endroit qui est situé à cette distance hyperfocale) permet d’obtenir la plus grande zone nette possible sur l’image.

Explication schéma de l'hyperfocale mise au point profondeur de champ
Voici ce qui se passe quand on effectue la mise au point à la distance hyperfocale.

Par quoi est-elle influencée ? Comment la calculer ?

Elle est influencée par la longueur focale (50mm, 100mm, etc…), l’ouverture que vous avez choisie (f/2.8, f/5.6, f/22, etc…) et ce qu’on appelle le cercle de confusion (dont on ne va pas se préoccuper pour le moment car c’est assez complexe).

Je ne vous donnerai pas la formule mathématique qui pique les yeux, car elle ne vous servirait à rien 😀 (si vous êtes matheux, vous pouvez consulter la page Wikipédia sur l’hyperfocale 😉 )

Pourquoi ça fonctionne comme ça ?

Une autre chose qu’il faut savoir pour bien comprendre est que la profondeur de champ ne se répartit pas de manière uniforme en avant et en arrière de l’endroit où vous avez fait la mise au point (que nous appellerons “sujet” dans la suite de cet article). En réalité, 1/3 de la zone de netteté se situe devant votre sujet, et 2/3 derrière. Et vous allez voir que cela va beaucoup nous aider pour utiliser l’hyperfocale.

Profondeur de champ
Répartition de la profondeur de champ autour du sujet

Comment l’utiliser concrètement ?

C’est là qu’on a un léger problème : autant sur les anciennes optiques du temps de l’argentique, il était facile de régler sur l’hyperfocale grâce aux repères de profondeur de champ. Autant maintenant, cette bonne habitude s’est perdue, et il paraît donc impossible de l’obtenir simplement sans faire un complexe calcul mathématique.

C’est pour ça que c’est à mon avis une notion un peu moins utile à l’heure des autofocus rapides et des viseurs électroniques.

Mais bonne nouvelle, si vous voulez l’utiliser sur un appareil récent, il y a une astuce 😉

Quand vous faites la mise au point à l’infini, la distance hyperfocale est en fait le point net le plus proche de vous. Comment procéder simplement :

  • Faites un cliché en mettant au point à l’infini.
  • Regardez le résultat : le point net le plus proche de vous est l’hyperfocale.
  • Refaites le même cliché en mettant au point sur l’hyperfocale plutôt que sur l’infini.
  • L’image est toujours nette jusqu’à l’infini, mais en plus vous avez gagné 1/3 de la zone de netteté, entre vous et ce point d’hyperfocale.

Cette technique vous permet d’obtenir un avant-plan net sur des photos de paysage. En pratique, on se contente bien souvent de mettre au point à environ 1/3 de la hauteur de l’image, ce qui est légèrement moins efficace mais beaucoup plus intuitif.

Ou mettre au point un paysage ? mise au point hyperfocale
Voici où mettre au point un paysage !

Attention, comme la distance hyperfocale n’est valable qu’à une longueur focale et à une ouverture donnée, il vous faudra refaire l’exercice à chaque fois que vous changez un de ces deux paramètres, c’est-à-dire quand vous zoomez/dézoomez ou quand vous changez l’ouverture !

Si vous souhaitez connaître l’hyperfocale plus précisément, il vous faudra la calculer. Il existe des tables permettant de connaître cette distance selon la longueur focale et l’ouverture, mais c’est un peu fastidieux.

Il existe également un excellent calculateur d’hyperfocale : impossible à emmener sur le terrain, mais je vous conseille fortement de le tester pour mieux comprendre ! C’est en anglais mais c’est très simple : il suffit de sélectionner son appareil, la longueur focale, l’ouverture, et la distance du sujet (ne pas oublier de régler en mètres). Vous obtenez ensuite la distance du début et de la fin de la zone de netteté, ainsi que la distance hyperfocale.

Attention : il semblerait que l’appli proposée par le site (payante) ne fonctionne pas.

Personnellement, j’utilise une application sur mon téléphone qui me permet de la connaître d’une façon similaire au calcul ci-dessous, mais c’est optionnel : la technique simple consistant à mettre au point à 1/3 de la hauteur de l’image vous permettra la plupart du temps d’obtenir des clichés nets de l’infini jusqu’à vous.

Ce qui est assez étonnant, c’est que grâce à cette distance, on peut obtenir des images totalement nettes même à grande ouverture. Par exemple, avec un 50mm f/1.8 réglé à son ouverture maximale (f/1.8 donc), l’hyperfocale est située à environ 70m. Donc si je mets au point à une distance de 70m, l’image sera nette de l’infini jusqu’à moi. Attention, rappelez-vous la définition plus haut : tout sera net à condition que l’élément le plus proche de moi visible sur le cliché soit à une distance d’au moins 35m (la moitié de l’hyperfocale).

Ces distances paraissent énormes, mais dans un cas plus classique avec un 20mm réglé à f/11, l’hyperfocale ne sera que de moins de 2 mètres ! Dans ce cas, il faut donc faire la mise au point non pas sur l’infini, mais à environ 2 mètres de distance, pour que l’image soit nette de l’infini à une distance d’un mètre de vous (la moitié de l’hyperfocale, toujours). Étonnant non ?

En résumé

J’ai conscience que ce concept est légèrement complexe, mais il est utile de le connaître car c’est le principe théorique qui vous permet d’obtenir une netteté étonnante sur la totalité de votre image, ce qui est parfois indispensable, notamment en photo de paysage.

Mais à l’heure du numérique, la plupart des optiques ne sont pas dotées d’une échelle des distances permettant simplement de mettre au point sur l’hyperfocale, c’est donc un peu plus compliqué de la calculer précisément.

Et très franchement, je vous déconseille de vous embêter à faire ça : le plus simple est de mettre au point à 1/3 de la hauteur de l’image, et ça suffit 😉

Plus récemment j’ai fait une petite vidéo pour râler un peu sur l’obsession pour l’hyperfocale qu’on peut voir ici et là (le format coup de gueule est voulu, je ne suis pas tout le temps énervé comme ça hein :D) :


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Laurent Breillat
J'ai créé Apprendre.Photo en 2010 pour aider les débutants en photo, en créant ce que je n'avais pas trouvé : des articles, vidéos et formations pédagogiques, qui se concentrent sur l'essentiel, battent en brêche les idées reçues, tout ça avec humour et personnalité. Depuis, j'ai formé plus de 14 000 photographes avec mes formations disponibles sur Formations.Photo, sorti deux livres aux éditions Eyrolles, et édité en français des masterclass avec les plus grands photographes du monde comme Steve McCurry.
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